La marque Territoire (Houllier-Guibert, 2018) « Autour du Louvre Lens » propose un retournement des valeurs négatives associées au Bassin minier pour en faire une force (Mortelette, 2019). De manière assez classique en marketing territorial, le but visé est de singulariser et de distinguer le territoire afin de le rendre attractif (Proulx, Tremblay, 2006) et d’en faire une promotion efficace auprès des touristes potentiels. Ainsi, de manière assez descendante, la mise en récit (Matthey, 2014)) territoriale construite par cet acteur reprend des éléments iconiques (saillants dans les représentations et imaginaires intra et extra-territoriaux) du Bassin minier : des marqueurs spatiaux (beffrois, terrils, maisons en briques), des éléments de folklore liés à son histoire sociale et migratoire (tissu polonais, gastronomie, fanfare, colombophilie) et métonymies (le charbon, le noir, notamment) dans une version léchée et design. La barraque à frites devient foodtruck et les restaurants se parent d’éléments factices rappelant une esthétique industrielle (ampoules à filaments épais, verrières, briques rouges, etc.) dans une optique de séduction des catégories de population. Néanmoins, parmi les différentes productions de la MLLT, le guide émotionnel interroge. Réalisé en partenariat avec le Pays d’Art et de d’Histoire de Lens-Liévin et la compagnie HVDZ, ce guide propose la collecte de témoignages d’habitants du Bassin minier, associés à des photos, pour un inventaire de lieux ordinaires du territoire. Mobilisant les émotions, les affects et le sensible, ce guide valorise une image originale du Bassin minier au sens où elle échappe aux représentations habituelles du territoire et redonne une place centrale à l’expression de mémoires intimes d’ordinaire réservées à un cercle proche ou gardées pour soi. A partir de l’exploitation de ce corpus et du positionnement stratégique de la MLLT, cette communication propose d’abord d’opérer une typologie des lieux ainsi valorisés et de les mettre en regard des paysages utilisés dans les opérations de communication territoriale plus classiques. Nous reviendrons ensuite sur ce que peuvent apporter les émotions et les affects dans la production de représentations ordinaires pour, enfin, analyser ce dispositif de manière critique au prisme du tourisme expérientiel (Cova, 2006) et de l’instrumentalisation des discours habitants.