Les perspectives sur l’engagement des artistes dans la contestation politique se sont profondément renouvelées. Certes, les débats concernant les liens entre art et politique sont loin d’être nouveaux, situés dans un vaste spectre qui va de l’art engagé à « l’art pour l’art », tandis que l’artiste engagé·e représente une figure archétypale depuis la fin du XIXe siècle. Toutefois, les études de la contestation politique ont longtemps traité l’intervention artistique de manière marginale. L’art y apparaît essentiellement dans ses contributions à la mise en forme et à la diffusion de la cause, et la figure de l’artiste engagé·e dans ses rapports aux appareils partisans. Les enjeux autour de la place de l’art dans le politique ont cependant été récemment réévalués en sciences sociales et politiques, à partir de deux axes principalement. En premier lieu, la réflexion sur les esthétiques politiques met en avant que si « tout art n’est pas politique, toute politique est esthétique » (Sartwell, 2010, p. 1). Pour cette approche, qui n’est pas sans évoquer les analyses de Stuart Hall sur les hégémonies (Hall, 1982), le pouvoir des régimes s’incarne aussi dans une esthétique, et la contestation de l’ordre politique implique la production d’esthétiques contestataires remettant en cause idéologies et représentations dominantes, environnements et médias. S’agit-il là d’un « tournant esthétique » en sciences politiques, comme le désignent certains ? Disponible sur : https://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2023-2-page-5.htm