La Révolution “côté crime”. Quatrevingt-Treize ou les zones d’ombre d’une apologie de la Terreur - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2013

La Révolution “côté crime”. Quatrevingt-Treize ou les zones d’ombre d’une apologie de la Terreur

Philippe Zard

Résumé

« [...] Hugo semble se défier de la violence insurrectionnelle, comme si la célébration de la Révolution ne pouvait intervenir qu’une fois passé l’épreuve sanglante de la fondation. Il y a là plus qu’un nouvel avatar de l’éternel débat de la fin et des moyens : l’intuition d’une sorte de péché originel de la Révolution qui en accompagne le cours et continue sourdement à hypothéquer son adhésion pleine et entière au mouvement de l’Histoire. [...] La fiction romanesque trouve là l’une de ses fonctions cardinales : dire et surmonter, sur le plan imaginaire, des antinomies que la pensée rationnelle laisse en souffrance. Dans la configuration narrative et mythique de Quatrevingt-Treize se disent tout ensemble une justification idéologique de la violence révolutionnaire et une rétractation venue de plus loin, qui interdit à Hugo d’accompagner jusqu’au bout la logique de la nécessité politique, et qui le pousse à des procédures de déni, de masquage et de sublimation ». On discerne dans le roman trois types de violence révolutionnaire dont l’écrivain se propose de rendre raison. La « violence légale » fait l’objet d’un traitement tantôt euphémisé (à la limite du déni), tantôt apologétique, en permanence opposée à la sauvagerie « vendéenne ». Elle devient toutefois problématique, lorsque sa mise en œuvre achoppe sur des antinomies, comme le montre l’exécution légale de Gauvain qu’accompagne le suicide de Cimourdain, comme si l’application de la Loi républicaine « méritait expiation ». Cette violence légale est néanmoins doublée par deux autres types de violence, qui se situent pour en deçà et au-delà d’elle : d’une part « l’émeute plébéienne, parfois indiscernable de la vengeance collective », expression d’une « violence ressentimentale, qui traverse le roman d’une manière spectrale ou allégorique » ; d’autre part la table rase, violence symbolique « qui travaille, dans l’horizon rédempteur de la Révolution, à mettre à mort le passé pour instaurer une nouvelle table de valeurs ; à cette utopie régénératrice, Hugo apporte un acquiescement assorti de réserves », presque toujours implicites, qu’exemplifie l’épisode du « massacre de Saint-Barthélemy » par la trinité des enfants otages.

Domaines

Littératures
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04261636 , version 1 (27-10-2023)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04261636 , version 1

Citer

Philippe Zard. La Révolution “côté crime”. Quatrevingt-Treize ou les zones d’ombre d’une apologie de la Terreur. Dufief Pierre; Perrin-Daubard Marie. Violence politique et littérature au XIXe siècle, Le Manuscrit, 2013, L'esprit des lettres, 2304040683. ⟨hal-04261636⟩
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