La Seine normande à contre-courant : le mouvement anticolonial vietnamien au Havre (1920-1936)
Résumé
A major commercial axis linked to the Empire, the Norman Seine was more open to foreigners between the two World Wars. The Vietnamese were few in number, but their presence in Le Havre was marked by some singularities (mixed marriages, choice of location in the city, ownership of shops...). Supposedly integrated into the economy of the colonial port, they nevertheless played, on the fringes, another partition of globalization, that of the anti-colonial struggle. Between 1923 and 1936, the Norman port became a logistical relay, a platform for raising public awareness and a field to be conquered for the various independence factions. Le Havre represented, after Marseilles and Paris, the third summit of a triangle of struggle in metropolitan France, both an outpost for the dissemination of propaganda and a rear base for militants. This article aims to demonstrate that, in the long term, Le Havre does not succeed in becoming a central cog for the cause in France, and that the role of the French Communist Party, particularly through its local cell, is ultimately very limited. On the other hand, it is important to stress the crucial role of the networks of seafarers and the usefulness, without their knowledge, of shipping companies in the dissemination of anti-colonial propaganda.
Axe commercial de première importance relié à l’empire, la Seine normande s’ouvre davantage aux étrangers dans l’entre-deux- guerres. Les Vietnamiens sont peu nombreux, mais leur présence au Havre est marquée par quelques singularités (mariages mixtes, choix de localisation en ville, possession de commerces…). A priori intégrés à l’économie du port colonial, ils jouent cependant, en marge, une autre partition de la mondialisation, celle de la lutte anticoloniale. Entre 1923 et 1936, le port normand devient un relais logistique, une plateforme de sensibilisation de l’opinion et un terrain à conquérir pour les différentes factions indépendantistes. Le Havre représente, après Marseille et Paris, le troisième sommet d’un triangle de lutte en métropole, tout à la fois avant-poste pour la diffusion de la propagande et base arrière pour les militants. Cet article veut démontrer que, sur le long terme, Le Havre ne parvient pas à devenir un rouage central de la cause en France et que le rôle du parti communiste français, notamment via sa cellule locale, est finalement très limité. En revanche, il s’agit d’insister sur le rôle crucial des réseaux de navigateurs et de l’utilité, à leur insu, des compagnies maritimes dans la diffusion de la propagande anticoloniale.
