Début juillet 2021, lors du Congrès annuel de Villes de France, le premier ministre Jean Castex annonce la prolongation jusqu’en 2026 du programme « Action Cœur de ville », qui devait prendre fin en 2022, après quatre années de fonctionnement. Si l’enjeu est notamment de permettre aux équipes élues en 2019 de porter les projets jusqu’à la fin de leur mandature, ce prolongement illustre également une volonté politique de maintenir la focale sur les villes moyennes. En effet, comme le précise l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), Action Cœur de ville est un programme national présentant un double objectif : « améliorer les conditions de vie des habitants des villes moyennes et conforter le rôle de moteur de ces villes dans le développement du territoire » . Il concerne 222 villes moyennes sur le territoire français (outre-mer inclus) et a été lancé en 2017 dans un contexte politique et médiatique ayant placé au premier plan la question de la dévitalisation des centres des villes petites et moyennes, en particulier sur le plan commercial (Munch et al., 2016 ; Razemon, 2016). Au-delà des seuls enjeux de reconquête des centres-villes par le commerce, le programme Action Cœur de ville se veut transversal en exigeant la mise en œuvre de projets combinant des actions sur plusieurs volets (habitat, commerces, mobilités, espaces publics, etc.), le tout dans un cadre intercommunal faisant dialoguer les acteurs de la ville-centre et de ses périphéries. En effet, le fait de revitaliser un centre-ville est envisagé comme un vecteur de redynamisation plus large pour la commune-centre comme pour les communes environnantes.L’enjeu de ce chapitre est de voir en quoi la mise en œuvre de programmes nationaux de revitalisation des centres-villes s’inscrit dans un mouvement plus large de territorialisation de l’action publique tournée vers les villes petites et moyennes. Plus spécifiquement, dans quelle mesure le programme Action Cœur de ville s’inscrit-il ou non en continuité avec les autres politiques ayant ciblé par le passé les villes moyennes ou ciblant actuellement les centres-villes des bourgs et des petites villes ?Après avoir dressé un panorama de la prise en compte progressive des villes moyennes et de leur revitalisation par les politiques publiques depuis la seconde moitié du 20e siècle, ce chapitre analyse plus spécifiquement le programme Action Cœur de ville, comme marqueur des transformations des politiques publiques territorialisées, entre continuités et obstacles persistants au niveau local. Ce chapitre s’appuie sur un travail de recherche documentaire et bibliographique, ainsi que sur les enquêtes réalisées dans le cadre d’une recherche doctorale . Ces enquêtes reposent sur des méthodes d’observation et d’entretiens, menées entre 2017 et 2021. Elles portent sur le programme Action Cœur de ville et l’action de l’État et d’acteurs publics ou parapublics dans les villes moyennes, à trois niveaux : au niveau national, auprès d’acteurs impliqués dans le pilotage du programme Action Cœur de ville ; auprès d’acteurs régionaux des Hauts de France, du Centre-Val de Loire, du Grand Est et de l’Occitanie ; et enfin auprès d’acteurs des services déconcentrés départementaux de l’Aisne, de l’Aude, de la Moselle et du Loir-et-Cher.