Maimonides' and Mendelssohn's Pharmacy
La pharmacie de Maïmonide et de Mendelssohn
Résumé
In this article, we examine the 12th-century jurist, rabbi and philosopher Moses Maimonides' revival of Platonic criticism of writing, based on Jacques Derrida's reading of the Phaedrus. We show that Maimonides also creates a dialectic between "bad" writing - poisonous, fundamentally harmful, a factor of forgetfulness and discord, and incapable of expressing the fullness of thought or the "secrets of the Torah" - and "good" writing, a remedy that denounces and circumvents as far as possible these intrinsic defects of writing. Moses Mendelssohn, the father of modern Jewish thought in the 18th century, radicalized this critique of scripture by seeing in it the principle of idolatry, but he also envisaged another "scripture" as the remedy for the first: the "ceremonial laws" of Judaism, described as "living scripture". We conclude that, from the perspective of these Jewish thinkers, books are necessary remedies against the poison of earlier, sealed books, starting with the Torah.
Nous nous penchons ici sur la reprise par Moïse Maïmonide, juriste, rabbin et philosophe du XIIe siècle, de la critique platonicienne de l’écriture, envisagée à partir de la lecture du Phèdre par Jacques Derrida. Nous montrons que l’on trouve chez Maïmonide également une dialectique entre une « mauvaise » écriture – poison, fondamentalement néfaste, facteur d’oubli et de discorde, incapable par ailleurs d’exprimer la plénitude de la pensée ou des « secrets de la Torah » – et une « bonne » écriture, remède, qui permet de dénoncer et de contourner autant que faire se peut ces défauts intrinsèques de l’écriture. Moses Mendelssohn, père de la pensée juive moderne au XVIIIe siècle, radicalise cette critique de l’écriture en y voyant le principe de l’idolâtrie, mais il envisage également une autre « écriture » comme remède de la première : les « lois cérémonielles » du judaïsme qualifiées d’« écriture vivante ». Nous concluons que dans la perspective de ces penseurs juifs, les livres sont des remèdes nécessaires contre le poison que constituent des livres antérieurs, devenus scellés, à commencer par la Torah.