Constantinos A. Doxiadis (1914-1975), architecte et urbaniste grec ayant une œuvre internationale importante après la deuxième guerre mondiale (ville nouvelle d’Islamabad, développement de la région de Detroit, reconstruction de la Grèce après la guerre…), propose une approche scientifique globale des établissements humains relevant de plusieurs champs disciplinaires : architecture, urbanisme, sociologie mais aussi statistique et applications informatiques, entre autres. Il appelle cette science « Ekistique », du mot grec « Ekos » (οίκος), maison. Doxiadis développe une théorie urbanistique dans laquelle il introduit nombre de néologismes afin de nommer les différentes situations qu’il se propose de décrire et évaluer : Dynapolis, Dynamétropolis, Anthropopolis, Entopie, Epéropolis… Son terme probablement le plus connu et ayant une incontestable valeur prospective est Ecuménopolis, du grec « Ecuméné » (Οικουμένη, la terre habitée, le monde), la ville-monde. Tous ces termes ont leur raison d’être : ils décrivent un phénomène nouveau, existant ou futur ; ils apportent un éclairage particulier à des phénomènes connus ou méconnus ; ils se substituent à des termes courants que Doxiadis considère désuets ou inadaptés ; ils sont porteurs d’idées spécifiques, expliquées par Doxiadis dans ses textes et son glossaire. S’il choisit le mot « anthropos » pour former des mots désignant la ville (anthropopolis) ou le monde (anthropocosmos) des êtres humains, c’est parce qu’en langue grecque le mot « anthropos » (l’être humain masculin ou féminin) est différent du mot « homme » (masculin) ; s’il forge le terme Ecuménopolis, c’est pour faire résonner l’importance du phénomène des grandes conurbations, qui commence à se dessiner pendant cette période (1960-1970) sur la côte Est des Etats-Unis, et de le théoriser à travers des projections vers un avenir plus ou moins lointain ; s’il propose une description de la ville future par la succession terminologique Dynapolis – Dynamétropolis – Ecuménopolis, c’est pour mieux marquer les phases de l’évolution de la ville en tant que forme mais aussi en tant que phénomène temporel. La recherche, s’appuyant sur ses écrits publiés ainsi que sur des documents d’archive, essaye d’éclairer les aspects idéologiques et les enjeux épistémologiques de certains termes du glossaire particulier de Doxiadis et les interpréter dans le contexte de ses propres idées, recherches et projets mais aussi des situations urbaines, territoriales et démographiques de son époque.