Cette contribution repose sur une réflexion constituée en deux temps. Pendant l'hiver 2001-2002, j'ai réalisé un séjour de quelques semaines, complété par des passages ultérieurs, dans un squat situé au centre de Genève. Le mouvement squat a atteint son acmé au milieu des années 1990 : environ 150 squats et 2 000 occupants (moyenne établie d'après diverses sources) ont fait de Genève l'une des villes proportionnellement les plus occupées d'Europe. J'engageais alors, par une démarche ethnographique, une étude visant la description minutieuse des formes de cohabitation constituées dans cet environnement militant. Dix ans plus tard, je me suis installé de manière plus pérenne à Genève et j'ai repris le fil de l'enquête. Le mouvement squat vivait alors son agonie et je l'ai découvert sous un angle différent, en partant de perspectives extérieures et distanciées venant à la fois de personnes qui se sont toujours considérées en dehors de ce« milieu», et d'anciens squatters qui désormais s'efforcent d'en construire une connaissance historique.