La sécurité et la santé des travailleurs (SST) est devenue un enjeu majeur autant pour les autorités publiques que pour les entreprises. S’intéresser aux problèmes de santé au travail en période de crise, c’est trouver un moyen de protéger les travailleurs contre les effets néfastes de la crise sur leur sécurité et santé. Cependant, le lien entre la crise, la sécurité et la santé au travail est très complexe. Une partie importante de la littérature, dominée par les économistes, trouve un lien procyclique entre le contexte économique et la sécurité et santé des travailleurs. Toutefois, ces travaux ne tiennent pas compte du contexte institutionnel, alors que les études en santé publique montrent que l’intervention publique face à la crise, peuvent être déterminante sur la sécurité et la santé d’une population. Bien que les questions de recherche posées dans les deux champs de recherche soient différentes, dans le cadre de cette thèse, il nous apparait important d’en tenir compte dans une analyse comparative européenne. Cette thèse est donc à la croisée entre économie et santé publique. Elle étudie le lien entre crise, sécurité et santé au travail et dépenses sociales. Ce travail de recherche est centré sur la population au travail, car en période de crise, les travailleurs doivent composer avec la crainte de perdre leur emploi, la réduction de la production et/ou l’évolution des exigences du poste de travail. Ces éléments influent sur la qualité de l’environnement au travail et les différents facteurs de risque d’accident du travail et de problèmes de santé au travail. Mais certains effets peuvent être contradictoires et ne peuvent relever uniquement de la conjoncture liée à la crise de 2008 sur laquelle nous nous sommes plus particulièrement penchés. La thèse a ainsi eu pour objectif d’identifier les facteurs de risques d’accidents et de problèmes de santé à partir des méthodes d’intelligence artificielle et économétriques. Ce travail conduit à plusieurs résultats significatifs avec des implications tant sur le plan managérial que celui des politiques publiques. Les résultats montrent que le travail est toujours physiquement exigeant et que les travailleurs disposent de moins en moins de ressources pour réaliser leurs tâches. Par conséquent, les entreprises gagneraient à axer leurs politiques de prévention des accidents de travail et des problèmes de santé au travail sur l’organisation du travail et une approche plus systémique plutôt que sur des indicateurs de performance souvent réducteurs. En ce qui concerne les politiques publiques, nos résultats confirment l’importance du rôle de la dépense publique pour atténuer les effets négatifs de la crise sur la santé et la sécurité au travail. Ce rôle de stabilisateur économique opère à travers l’augmentation des dépenses de protection sociale, comme les politiques actives d’emploi ou bien les dépenses liées à la santé et à la vieillesse. Ainsi, en période de crise, des politiques budgétaires expansives ont permis de soutenir les entreprises et les travailleurs, par conséquent à renforcer la résilience des pays lorsqu’ils ont été exposés à de forts ralentissements économiques.