L’histoire de la restauration de Notre-Dame de Paris est généralement racontée selon les points de vue des différents acteurs : les tailleurs de pierre, les conservateurs, les architectes. Cette contribution propose d’inverser la perspective du récit et de se placer depuis le point de vue de deux claveaux issus de l’arc doubleau démoli par l’incendie. Ainsi, le récit biographique de deux claveaux est présenté dans toute la singularité de leur trajectoire : en élévation, en chute, enfoui sous les déblais, nettoyé, dépollué, numérisé, abstrait dans un inventaire, étudié et observé, annoté et identifié sur des images, restitué, retaillé, carotté, restauré, etc. Les objets sont replacés au centre du récit, en tant qu’acteurs à part entière de l’histoire de Notre-Dame. Ce travail s’inscrit dans la continuité théorique d’assemblage social (DeLanda), de l’Object-Oriented Ontology (Harman), de l’Acteur-Réseau-Théorie (Latour) et l’approche biographique en matérialité culturelle (Kopytoff). Il s’en distingue par la spécificité de ces trajectoires, tantôt fluctuantes par leur position dans l’espace ou dans le temps, tantôt intermittentes dans leurs représentations physiques et numériques. Le récit non-linéaire résultant de ces trajectoires favorise l’utilisation des méthodes issues des sciences de l’information, notamment le mapping, la représentation conceptuelle et l’enrichissement de métadonnées. En retissant les liens entre des jeux de données hétérogènes et imperméables, la trame narrative prend alors la forme de visualisations en graphe de requêtes pour des Linked Open Data (LOD). Les liens sémantiques sont retracés pour reconstituer l’histoire du claveau à partir de ses données.