La question des migrations est au coeur non seulement de ce qu'il est convenu d'appeler « le débat politique », dans un système avéré de propagande médiatique, mais, plus profondément, de la réalité du monde contemporain où elle vient faire effraction au sein des représentations nationalistes d'un monde pourtant bel et bien globalisé. La présence des exilés dans l'espace public renvoie à ce non-dit que décrivait déjà Baudelaire sur les trottoirs de Paris, et dont, avant lui, Spinoza avait fait l'expérience dans le port d'Amsterdam, plaque tournante de la Traite des noirs. Mais le déni jeté sur les exilés comme réalité politique est ce qui exile les sédentaires eux-mêmes de leurs lieux d'appartenance et d'un espace social dans lequel ils puissent se reconnaître. Et ce sentiment d'exil sur son propre territoire est un puissant motif de résistance et de revendication. En pleine montagne, dans les Alpes, la petite ville de Briançon en est un creuset. Creuset de ce que signifie, pour des professionnels de la montagne, la vision de leur espace protégé transformé en terrain de chasse à l'homme. Et des puissances de résistance qui se nouent autour de cet inacceptable.