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Article Dans Une Revue Lignes Année : 2019

The space of deviations

L'espace des écarts

Résumé

The gap between the avowed purpose of political power and its real purpose creates the abuse of power, and therefore the abuse of representativeness, if the power bases its legitimacy only on its claim to be representative. The space of this gap is the street, as a figure of the public space: space outside, that is to say space of circulation, on which the roundabouts create a correlative phenomenon of embolization and exchange. On which the avenues channel the reiterated event of manifestation. So what does fluorescent yellow mean? If not the possibility of recognizing oneself in these disappropriated spaces of the public domain, of producing there the identification of gatherings, of making the multitude vibrate in the light from a signal of danger? Neoliberal policies have played on “neither left nor right” to impose the absence of an alternative. The roundabouts, in the vertigo of the roundabout, take them at their word, knocking down these names from another age: that of the partition of places in the National Assembly and its theatricalization in an amphitheater of public debate. Because, if the social networks have become the symbolic arena in a virtual space, the real conflict takes place, for its part, not in the synchrony of this "real time", but in the concrete reality of the physical confrontation and its risks. Ten dead on the roundabouts, more than two thousand injured, including hundreds of mutilated people with gouged out eyes or torn limbs. And we do not count here the other post-traumatic effects of the confrontation with police violence, nor the long-term physical effects of this violence, even when it is not immediately lethal or mutilating. Not to mention its deterrent effects. The abuse of power thus denounces itself through the brutality of repression. Of what history of deviations is this violence therefore a symptom?
L'écart entre la finalité avouée du pouvoir politique et sa finalité réelle crée l'abus de pouvoir, et par là même l'abus de représentativité, si le pouvoir ne fonde sa légitimité que sur sa prétention à être représentatif. L'espace de cet écart est la rue, comme figure de l'espace public : espace du dehors, c'est-àdire espace de circulation, sur lequel les ronds-points créent un phénomène corrélatif d'embolisation et d'échange. Sur lequel les avenues canalisent l'événement réitéré de la manifestation. Que signifie alors le jaune fluo ? Sinon la possibilité de se reconnaître dans ces espaces désappropriés du domaine public, d'y produire le repérage des rassemblements, de faire vibrer la multitude à la lumière à partir d'un signal de danger ? Les politiques néolibérales ont joué sur le « ni gauche ni droite » pour imposer l'absence d'alternative. Les ronds-points, dans les vertiges du sens giratoire, les prennent au mot, en faisant valdinguer ces appellations issues d'un autre âge : celui de la partition des places à l'Assemblée nationale et de sa théâtralisation en amphithéâtre du débat public. Car, si les réseaux sociaux en sont devenus l'arène symbolique dans un espace virtuel, le conflit réel se déroule, lui, non pas dans la synchronie de ce « temps réel », mais dans la réalité concrète de la confrontation physique et de ses risques. Dix morts sur les ronds-points, plus de deux mille blessés, dont des centaines de mutilés aux yeux crevés ou aux membres arrachés. Et l'on ne comptabilise pas ici les autres effets post-traumatiques de la confrontation à la violence policière, ni les effets physiques de long terme de cette violence, même lorsqu'elle n'est pas immédiatement meurtrière ou mutilante. Pour ne pas parler de ses effets dissuasifs. L'abus de pouvoir se dénonce ainsi lui-même par la brutalité de la répression. De quelle histoire des écarts cette violence fait-elle donc symptôme ?
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Citer

Christiane Vollaire. L'espace des écarts. Lignes, 2019, n°59 (59), pp.195. ⟨10.3917/lignes.059.0195⟩. ⟨hal-04053223⟩
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