Depuis 1968, l’entrée des syndicats au sein des entreprises offre aux salariés une nouvelle représentation, à côté de la représentation élue du personnel. Il revient alors aux délégués syndicaux d’assurer la négociation collective à ce niveau. De récentes réformes généralisent cependant des dispositifs de sollicitation directe des salariés afin de conclure des accords d’entreprise aux motifs allégués d’une « modernisation du dialogue social » et d’un « renforcement de la négociation collective » . En effet, la consultation des salariés intervient soit pour permettre de rendre valide un accord collectif signé par des syndicats représentatifs mais minoritaires, soit pour permettre la conclusion d’accords dans des entreprises au sein desquelles il n’existe aucun délégué syndical. Dans ce dernier cas, le vote des salariés permettra d’approuver un accord conclu avec des agents palliatifs de négociation ou, dans les plus petites entreprises dépourvues de toute institution représentative du personnel, d’approuver une décision unilatérale de l’employeur. Ainsi la sollicitation directe des salariés pourrait-elle apparaître comme renfort des syndicats ou comme remède à leur absence. Toutefois, l’examen approfondi de ces nouveaux dispositifs interrogent quant aux possibilités qu’ils laissent à l’employeur. En faisant du droit de la négociation collective un droit, non plus seulement des travailleurs, mais des « entreprises », les réformes permettent à l’intérêt collectif d’être supplanté par les intérêts individuels des salariés consultés mais davantage encore, par les intérêts de l’employeur. Tels sont les dangers sur lesquels j’ai entendu porter l’attention en examinant le détail de ces procédés de sollicitation directe, tout en interrogeant leur conformité avec les normes constitutionnelles et internationales applicables.