Les oublié.e.s du Centre for Contemporary Cultural Studies : entre perception extérieure schématique et histoire interne contradictoire
Résumé
En 1963 au Royaume-Uni, il n’était pas possible de consacrer son travail de thèse à la presse féminine adolescente, la radio ou la culture skinhead. Ce fut cependant le cas l’année suivante, où fut fondé le Centre for Contemporary Cultural Studies à l’Université de Birmingham par Richard Hoggart et Stuart Hall. Richard Hoggart est avant tout célèbre en tant qu’auteur de l’ouvrage The Uses of Literacy, publié en 1957, Stuart Hall pour avoir contribué à déconstruire les concept de « race » et du thatchérisme, terme dont il est l’inventeur. Fruit de leur collaboration, le CCCS est plus connu sous le nom de « Birmingham school », et parmi les écrits les plus importants publiés en son sein, les ouvrages collectifs féministes n’ont pas réussi l’épreuve de la postérité aussi bien que d’autres publications, consacrées par exemple aux sous-cultures ou au discours médiatiques autour de la criminalité. À travers un examen précis de l’historiographie du Centre, par le biais de l’exploitation des archives du CCCS et d’entretiens de ses anciens membres, seront mises en tension les invisibilités du CCCS à la fois au sein de l’histoire universitaire et de la Nouvelle Gauche britannique, et de celle de sa propre histoire, dans une dialectique articulée entre une invisibilité du dehors et une invisibilité du dedans. Cette communication a pour but de mettre en lumière de quelles manières une structure universitaire dédiée en grande partie aux oublié.e.s et aux invisibles de l’histoire — ici les objets et sujets non dignes de l’institution universitaire au début des années soixante — a elle-même été d’une part représentée de manière erronée ; et d’autre part le lieu d’une répétition partielle de ce qu’elle cherchait à déconstruire. Pour ce faire, trois éléments seront analysés : les représentations erronées de la « Birmingham school » dans le monde universitaire contemporain ; les différentes publications du CCCS, de leur condition d’écriture à l’intérieur du Centre à leur impact sur leur champ de recherche respectif ; et la place de ses anciens membres dans le monde professionnel, universitaire ou non.