Forteresses et insécurité publique : mise en ordre et désordres des Etats piémonto-savoyards (1559-1610)
Résumé
Les forteresses militaires ont traditionnellement une double fonction de sécurité extérieure et de maintien de l'ordre. La politique de fortification des souverains piémonto-savoyard dans la deuxième moitié du XVIe siècle s'inscrit dans cette vision. Emmanuel-Philibert, puis son successeur Charles-Emmanuel Ier, fondent en grande partie la défense de leur Etat sur un réseau dense de forteresses. Elles assurent aussi à partir de 1565 la sécurité des troupes espagnoles en route pour les Flandres et servent d'entrepôt des vivres militaires. Cette politique est présentée comme une nécessité pour le bien commun. Cependant, la mise en place de ces garnisons pose des problèmes d'ordre public. On assiste à des violences militaires dans les campagnes environnantes, mais aussi à des violences des populations à l'encontre des militaires. Il s’agit de comprendre comment une politique de fortification fondée sur une logique d'ordre intérieur et extérieur produit de l'insécurité. Partant de là, nous analysons la façon dont les autorités tentent de résoudre cette contradiction. L'Etat mène d'abord une politique de répression et de disciplinarisation des hommes dans un contexte de tensions et conflits internationaux, qui augmente la présence des militaires dans l'Etat piemonto-savoyard. Il réorganise ensuite l'administration de l'armée et des forteresses afin de réduire les causes des exactions militaires. Enfin, il met en place des protocoles de réparation des préjudices subis dans l'espoir de restaurer l'ordre politique et social.