Resistencia est une ville qui se trouve à environ mille kilomètres au nord de Buenos Aires, près de la frontière paraguayenne et brésilienne avec l’Argentine. Le 13 décembre 1976, vingt personnes, membres pour la plupart de l’organisation armée Montoneros, sont assassinées dans des conditions obscures par des membres des forces conjointes (forces armées et de sécurité). Cesassassinats/disparitions portent le nom de Massacre de Margarita Belén. Les recherches des proches de ces personnes les ont amenées vers la « Brigada de Investigaciones », un siège des forces de sécurité de la ville qui se trouve en plein centre-ville face au siège du gouvernement local. Ils découvrent que leurs proches, après leur enlèvement, y ont été détenus dans des conditions infrahumaines et torturés. Ils commencent à se réunir devant ce lieu pour réclamer des informations sur leurs proches détenus-disparus. Après la fin de la dictature en décembre 1983, les familles continuent de se réunir face à ce lieu, dans lequel se trouvent toujours les forces de sécurité. Par la suite, les forces de sécurité sont délogées et les pouvoirs politiques locaux y installent les bureaux d’une compagnie des eaux. La « Brigada » devient progressivement un lieu de dénonciation« privilégié » des crimes commis par le régime militaire pendant la dictature dans la province du Chaco. En 2005, les bureaux sont eux aussi délogés et le lieu devient le siège de la Comisión Provincial por la Memoria du Chaco.
Dans notre intervention, il s’agit de revenir sur le rôle que joue ce lieu dans le cadre des réclamations des proches des victimes de la Masacre de Maragarita Belén. Cela nous permettra ainsi d’évoquer le cas singulier de construction d’une mémoire locale autour des crimes de la dernière dictature en Argentine et de revenir sur l’importance de la récupération des centres clandestins de détention dans l’élaboration d’une mémoire collective sur le passé dictatorialdepuis plus de vingt ans en Argentine. (…) L’analyse du cas de la « Brigada » nous permettra d’établir des pistes de réflexion à propos des lieux de mémoire urbains.