Une cérémonie politico-religieuse : le couronnement de Sainte Radegonde, 14 août 1887 - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2011

Une cérémonie politico-religieuse : le couronnement de Sainte Radegonde, 14 août 1887

Résumé

Le 14 août 1887 eut lieu, en la cathédrale Saint Pierre de Poitiers, le couronnement solennel de la statue de la patronne de la ville, sainte Radegonde. Ce n’était pas la première cérémonie de couronnement qui se produisait dans ce diocèse. Le très ultramontain Monseigneur Pie avait couronné en 1863 la statue mariale de Notre Dame la Grande, à Poitiers, et en 1873 celle de Notre Dame de Pitié, située dans le nord du diocèse. Que signifiait le couronnement de Sainte Radegonde, décidé par le successeur du cardinal Pie, Monseigneur Pelgé ? S’agissait-il de refaire les cérémonies précédentes ? Pourquoi alors ne pas couronner Notre Dame de Celles-sur-Belle, pour parachever la protection mariale du diocèse ? Les fidèles ne risquaient-ils pas de voir leurs repères brouillés, si une autre sainte semblait rivaliser avec la Vierge Marie ? Pour comprendre ce couronnement, il est nécessaire d’en suivre le déroulement et de le contextualiser. L’analyse de chacune des étapes de la cérémonie, depuis la préparation jusqu’à son épilogue, va permettre de dégager les traits caractéristiques du catholicisme fin-de-siècle. Le premier point à relever est le savoir faire ecclésiastique pour l’organisation d’une telle célébration. Il ne s’agissait point, comme le croyaient bien des fidèles, d’une liturgie traditionnelle. L’Église catholique maîtrisait parfaitement les cérémonies de masse dans toutes leurs dimensions, temporelles et spatiales. D’un bout à l’autre, la fête fut gérée par le clergé. Il l’avait voulue, préparée, organisée comme un moment de mobilisation des fidèles. La première partie de la communication en donnera les modalités. La liturgie fut somptueuse. Pour le clergé, il s’agissait d’entretenir la ferveur des poitevins en agissant sur tous leurs sens pour les éblouir, les émerveiller, les contenter. La recherche de la somptuosité avait guidé le cérémonial. Les prélats étaient nombreux autour de l’évêque de Poitiers. Le faste des tissus décorant les édifices, le luxe des vêtements liturgiques, l’ampleur des musiques, la richesse de la couronne ne prenaient leur sens que parce qu’il y avait foule pour admirer les objets et les personnes. En se montrant ainsi, l’Église entendait dire et se dire à elle-même que sa place dans la société était légitime. Car la cérémonie fut un rite de l’affrontement entre l’Église et la République. Les incidents qui émaillèrent le couronnement révèlent les enjeux pour les pouvoirs publics comme pour le clergé. L’affrontement dans la presse, dans la rue, puis dans les tribunaux, témoignait de la vigueur du conflit. Les aspects ouvertement monarchistes du décorum sont le signe de la politisation de la religion en cet été 1887 où sévissait une crise ouverte depuis plusieurs mais par les révélations des trafics d’influence organisés par le gendre du Président de la République. La réaction des autorités confirme que l’État républicain et laïque entendait, en dépit de cette situation, faire respecter ses prérogatives et ses principes.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04010374 , version 1 (01-03-2023)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04010374 , version 1

Citer

Jérôme Grévy. Une cérémonie politico-religieuse : le couronnement de Sainte Radegonde, 14 août 1887. Foules catholiques et régulation romaine : Les couronnements des vierges de pèlerinages à l’époque contemporaine (XIXe et XXe siècles), Paul d'Hollander, Oct 2009, Limoges (France), France. p. 151 à 163. ⟨hal-04010374⟩
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