Au sein d’un espace, de très nombreuses activités se superposent. Qu’il s’agisse d’activités spécialisées, ou de simples passages, elles laissent de nombreuses traces sur les sols que nous pouvons redécouvrir à la fouille. Face à la complexité de ces informations, il est souvent présupposé que la position des éléments est trop aléatoire pour que l’on puisse les analyser autrement que comme un seul ensemble. Comment alors démêler l’ensemble des traces pour identifier celles correspondant à des gestes particuliers ? Comment distinguer les objets issus des bris volontaires des autres objets ? Est-ce que des traces particulières sur l’objet même permettent de détecter les gestes de bris volontaires ? Ce sont les questions que nous nous sommes posés lors de l’ouverture en 2018 d’un petit espace funéraire de la nécropole de Porta Nocera à Pompéi qui demeurait jusqu’alors inexploré. Situé au milieu d’enclos funéraires et de mausolées monumentaux, cet espace funéraire très modeste a livré un contexte d’une exceptionnelle conservation. En effet, immédiatement sous les dépôts de l’éruption de 79 apr. J.-C a été découvert un niveau homogène contenant de nombreux fragments d’objets caractéristiques des niveaux de fréquentation des espaces funéraires1. Il s’agit de gobelets en céramique à parois fines, de lampes à huile ou encore de vase à parfum en terre cuite ou en verre, qui sont employés lors des gestes commémoratifs à l’issu desquels ils sont brisés ou déposés au sein de la tombe. Afin de répondre à ces questions nous avons conduit une expérimentation de bris intentionnel et de reproduction des objets archéologiques. Une collection d’objet a ainsi pu être réalisée par une potière spécialiste de la reproduction archéologique. Chaque objet a été brisé selon différentes modalités (écrasement, sabrage, jet, frappe) sur un terrain expérimental. Par l’étude de la position de chaque fragment nous avons pu construire une série d’indices géostatistiques. La conduite d’une analyse en composante principale a permis de montrer qu’au moyen de ces indices il était possible d’identifier des gestes de bris intentionnel et leurs modalités. L’étude des traces d’impact sur les objets après remontage a également permis de confirmer ces hypothèses. À partir de ces résultats il a été possible de démontrer l’intentionnalité du bris des objets découverts dans la nécropole à Pompéi, ainsi que d’identifier leurs modalités. Par l’étude des fragments d’objets c’est ainsi le comportement humain qui est mis en lumière par les traces laissées sur les sols.