"Penser la vulnérabilité à partir de ses négations"
Résumé
La vulnérabilité peut n’être pas reconnue ou reconnue comme ce qu’elle est, c’est-à-dire comme une vulnérabilité commune à tous, qui fonde notre commune humanité et dont dérive les obligations que nous avons les uns à l’égard des autres. Elle peut, autrement dit, faire l’objet de négations, dont les figures et les facteurs sont multiples, mais qui doivent être prises en considération, car elles frappent d’ineffectivité les obligations morales dont la vulnérabilité est porteuse. Nous ne pouvons en effet être mu par la vulnérabilité d’autrui si nous nions qu’elle existe et s’ancre dans une condition commune dont elle est aussi le signe et le témoin. Penser la vulnérabilité – ou plutôt ce que nous devons en faire – en partant de ses négations, c’est donc poser différemment la question morale et politique que la vulnérabilité fait surgir et les réponses que nous devons y apporter. Ce n’est pas d’abord se demander ce que sont exactement les obligations dont la vulnérabilité est le fondement et comment nous devons les honorer ; c’est se demander plutôt comment il se fait que nous puissions la plupart du temps ne pas les honorer ou ne pas y répondre ; c’est se demander comment nous devons agir non pas d’abord pour répondre à la vulnérabilité, mais pour travailler à sa reconnaissance et à la mise en discussion des réponses qu’elle appelle de notre part.