Les pesticides sont présents dans tous les milieux marins, des lagunes, aux récifs, de même qu’au large, jusque dans les profondeurs des fosses océaniques. Les prises (Chateauraynaud, 2015) dont nous disposons pour appréhender une contamination invisible et inodore dépendent des façons dont la problématique est exposée, documentée, illustrée et matérialisée dans l’espace public (Baecher et al., 2020). En Martinique, l’utilisation de l’insecticide organochloré « Chlordécone » - officiellement - entre 1972 et 1993 pour lutter contre le charançon du bananier a eu pour conséquence la pollution durable des organismes humains et non humains habitants le territoire insulaire. Aussi, un tiers du littoral de l'île est fermé à la pêche, afin de préserver les consommateurs et consommatrices d'un empoisonnement au chlordécone. Ce scandale sanitaire et environnemental, au coeur de rapports de force postcoloniaux et postesclavagistes, donne lieu à des mobilisations de la société civile et des procès intentés à l'Etat ainsi qu'aux planteurs. Cette communication s’attache à retracer la façon dont la contamination de la mer apparaît dans cette controverse sociotechnique (Pestre, 2007, Chateauraynaud, 2011). Elle vise à interroger comment la contamination chimique des océans s'intègre dans les représentations d’un environnement pollué. Elle démontre et explore comment la contamination océanique au chlordécone se vit avant tout comme une contamination intime.