Apiculteur, photographe et cinéaste, Sylvère Petit nous invite à porter un autre regard sur les vivants non-humains qui nous entourent. Dans ses courts métrages de fiction, Les Ventileuses (2009) et Les Assoiffés (2014), il a cherché à inclure le point de vue des animaux. Avec ses documentaires Biòu (2014) et Ani-maux (2017), c’est son propre regard d’humain-cinéaste qui se modifie, désormais posté à hauteur d’animal, plaçant les humains hors champ. Pour son prochain film, La Baleine, qui sera son premier long métrage de fiction, Sylvère Petit s’inspire d’une histoire réelle, celle d’un couple de vignerons qui dans les années 1980 a dépecé une baleine échouée sur une plage de Méditerranée pour en reconstituer le squelette dans leur cave, après avoir plongé les os dans un marécage, invitant les micro-organismes à les nettoyer. La place occupée par le personnage principal, Corbac, à l’intersection des mondes humains et animaux, des organismes unicellulaires et des grands mammifères marins, de l’agriculture productiviste et d’une attention au vivant, tout comme la place relationnelle singulière du cinéaste lui-même, peut être assimilée à celle d’un diplomate, au sens où le philosophe Baptiste Morizot a forgé ce concept, c’est-à-dire celui qui, pour œuvrer à une « diplomatie interespèces des interdépendances », se tient « à hauteur de vivants ». Cet entretien a été réalisé à Montpellier les 13 et 26 juillet 2021.