Le calcul graphique est fondé sur la correspondance entre les deux grands types d’objets mathématiques que sont les nombres et les figures, autrement dit l’algèbre et la géométrie. Les données numériques d’un problème étant représentées sur la feuille de dessin par des segments, on réalise ensuite des constructions géométriques qui aboutissent à de nouveaux segments dont les longueurs représentent les résultats cherchés. Plus rapide que le calcul numérique utilisant les tables de logarithmes, le calcul graphique a longtemps convenu aux besoins courants des ingénieurs et d'autres professions ne recherchant pas une très grande précision. Si l’on rencontre dans l’Antiquité et au Moyen Âge des pratiques qui s’apparentent au calcul graphique moderne, c’est surtout pendant le XIXe siècle que ce dernier s’est constitué en tant que corps de doctrine. Il a lors confirmé sa pertinence et son efficacité au service, entre autres, du rôle croissant de l'artillerie dans les opérations militaires, du développement rapide des réseaux de routes et de voies ferrées, et de la conception de grandes structures métalliques comme la tour Eiffel. Après avoir connu son apogée entre les deux guerres mondiales, il est entré en déclin face à la concurrence des calculatrices électroniques et des ordinateurs. En dépit de son importance, le calcul graphique n’a pas encore fait l’objet d’une contribution d’envergure de la part des historiens des sciences. Le présent ouvrage se propose donc d’étudier l’histoire de cette discipline dans son ensemble, de rechercher des traces de ses origines et de se pencher de manière approfondie sur ses diverses composantes.