Les vases en argent présents dans l’Antiquité sur les territoires compris entre le Nord de l’Inde (Gandhara) et les provinces perses orientales de Bactriane et de Sogdiane offrent un éclairage inédit sur la circulation des savoirs et des savoir-faire entre Orient et Occident. Depuis l’expédition d’Alexandre le Grand et jusqu’à la conquête islamique, des bols, des coupes, des plats et des bouteilles ont été importés par l’Océan Indien ou sur les chemins caravaniers de l’Asie. Ils ont été répliqués, réinterprétés et transformés en un répertoire centrasiatique qui se distingue autant par son mélange d’influences artistiques et techniques gréco-romaines et indo-iraniennes, que par son originalité. Si les textes – comme le Périple de la mer Érythrée – gardent quelques références à l’exportation d’objets romains finis, nous n’avons aucune information sur la circulation des modèles, des moules ou des maîtres. C’est seulement par l’étude de ces objets – souvent dépourvus de contexte archéologique – que nous pouvons observer l’immense diversité et complexité des transferts. Dans cette présentation, nous nous arrêtons sur quelques exemples précis : le plat d’Aulis, fabriqué probablement en Italie au I er siècle av. J.-C., qui a pu arriver en 265-266 apr. J.-C., suite aux guerres de Shapur Ier, dans un temple kuchan du dieu Manabag (le Zoroastrien Vohu Manah, Maître de la pensée) ; un plat fragmentaire d’or, découvert à Datong (en Chine), qui a dû être moulé au Gandhara selon un modèle romain du III e siècle apr. J.-C., retravaillé ; un bol kidarite, au IV e siècle apr. J.-C., qui pourrait conserver la seule trace iconographique des mystères dionysiaques organisés dans les cités de l’Asie Mineure pré-chrétienne, transposée par une technique sassanide, en un contexte hun.