“Silent Meeting, A Wonder to the World” : les premiers quakers et le bruit du monde - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue XVII-XVIII Revue de la Société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles Année : 2016

“Silent Meeting, A Wonder to the World” : les premiers quakers et le bruit du monde

Résumé

De tous les mouvements religieux issus du protestantisme radical anglais du XVIIe siècle, le quakerisme est certainement celui qui a investi le silence du poids spirituel le plus lourd. Le premier quakerisme, marqué par un anti-formalisme extrême, refusait tout service divin et toute éloquence sacrée qui auraient adopté des mots et des gestes initiés par d’autres ; ce formalisme – « nauséeux à Dieu comme aux hommes, » selon la formule de William Penn – n’étant qu’une manière d’enterrer l’esprit chrétien sous la lettre qui tue, les quakers ont très tôt adopté le recueillement collectif et méditatif connu sous le nom de « réunion silencieuse » (Silent meeting), comme l’écrin propre à laisser l’esprit de Dieu se manifester librement parmi eux. Aussitôt accusés de ressusciter l’esprit monastique « en faisant reposer une si grande part de leur religion sur le silence » (The Quaker-Jesuite), les polémistes quakers comme William Britten dans Silent Meeting, A Wonder to the World (1660) ont été contraints de défendre ce qui apparaissait comme un écart scandaleux vis-à-vis de la culture bibliciste, centrée sur le sermon et l’écoute de la parole de Dieu très prégnante dans le monde non-conformiste auquel ils appartenaient par ailleurs. L’éthique et la spiritualité du silence des quakers vont cependant bien au-delà du Silent meeting. Appelé par George Fox à se « tourner en dedans » (turn inward), le quaker devait « apprendre d’abord à s’imposer un pur silence » (Britten) afin de faire taire en lui par le pouvoir de Dieu non seulement le bruit du monde, mais aussi l’écho persistant de sa propre chair et de son propre esprit, l’impératif de silence devenant alors l’élément central et la métaphore du combat du chrétien. « Recommandant le silence par leur exemple » (Penn), et surtout par un laconisme ostentatoire et bientôt proverbial, les quakers étaient alors également en mesure de restituer à la parole sa fonction véritable de miroir transparent du cœur régénéré, loin des mensonges, des masques et des rôles dont le langage se faisait le véhicule complaisant, sinon le complice actif. En tant que « témoignage pour la vérité », le silence quaker devenait ainsi belliqueusement loquace, comme un vivant reproche adressé à la séduisante rhétorique du monde contre laquelle la « guerre de l’agneau » devait être menée sans faiblesse.

Dates et versions

hal-03897205 , version 1 (13-12-2022)

Licence

Paternité - Pas d'utilisation commerciale - Pas de modification

Identifiants

Citer

Cyril Selzner. “Silent Meeting, A Wonder to the World” : les premiers quakers et le bruit du monde. XVII-XVIII Revue de la Société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles , 2016, 73, ⟨10.4000/1718.705⟩. ⟨hal-03897205⟩

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