L’intérêt pour les expositions temporaires d’art moderne et contemporain, de plus en plus fréquent depuis une vingtaine d’années en histoire de l’art, soulève des paradoxes épistémologiques aussi bien que méthodologiques. Qu’est-ce qu’on étudie au juste lorsque, comme dans les expositions de groupe du début du 20e siècle, il n’y a pas une pensée homogène de l’accrochage ? Lorsque la considération de l’espace s’arrête à sa représentation dans l’œuvre et non pas à l’espace de présentation ? Quel serait l’objet d’une histoire des expositions si ce n’est celle des œuvres qui y étaient exposées ? En s’appuyant sur les idées de Jean-Marc Poinsot et de Reesa Greenberg, cet article conceptualise l’exposition en termes d’« événement discursif » en tenant compte de la tension entre intentionnalité et contingence, entre autorité et potentiel utopique. Il suggère que l’exposition était pour les avant-gardes dites historiques des années 1910-1920 (avant-gardes russes et dada) un moyen de produire un espace public et d’agir sur l’histoire.