Il est à l'évidence particulièrement agréable et stimulant de plonger dans la pensée de Foucault, et plus encore d'y confronter ses connaissances de juriste, pour découvrir combien ce penseur invite à décloisonner les savoirs, et à éprouver les théories classiques pour en écarter les faux-semblants. Le mérite de Fatou Ba Sene est donc grand d'avoir organisé cette rencontre autour de Foucault et d'avoir proposé une réflexion très stimulante sur le libéralisme dans la pensée de cet auteur majeur. Mais l'effet que produit la lecture de Foucault et de ses commentateurs peut bel et bien s'apparenter à un certain vertige. Le vertige est sans doute ce qui menace le juriste qui se plonge dans la pensée de Foucault. Vertige d'une pensée à la fois universelle et très hostile aux outils habituels de la science politique et du droit. Lire Foucault se résume ainsi parfois à ressentir la vérité en tournant le dos à des certitudes longuement acquises. Un peu comme s'il s'agissait de prendre un psychotrope aux effets puissants, dont on sait avec un certain soulagement qu'ils seront éphémères. Il s'avère par exemple difficile de confronter la vision classique du publiciste, marquée par la notion de souveraineté comme fondement de l'Etat, avec certains écrits de Foucault, et particulièrement ceux « de la fin », c'est à dire les deux cours au Collège de France, dont Naissance de la biopolitique, en 1979 1. L'expérience procurée par la lecture de Michel Foucault est donc un voyage au-delà du miroir de nos connaissances, et c'est un voyage absolument passionnant.