Images de l’Amérique du Sud au théâtre (fin XVIIe-XVIIIe) : fantasmes de l’altérité
Résumé
À la fin du XVIIe siècle et dans la première moitié du XVIIIe siècle, plusieurs spectacles renvoient au Nouveau Monde. Cet article se propose de voir comment le genre théâtral a pu à cette époque construire et interroger l’image du Sud-Américain, à la fois dans un rapport exotique (qui laisse l’Autre à distance de soi-même) et dans une recherche d’inventivité propre aux écritures spectaculaires, dont la réussite dépend des attentes d’un public. L’étude porte sur "Les Intrigues d’Arlequin aux Champs-Élysées" de l’abbé Bordelon, comédie peu connue de l’Ancien Théâtre-Italien, qui offre une image burlesque du Brésil et profondément composite, ainsi que sur la tragédie "Alzire ou les Américains" de Voltaire (1736), qui se déroule dans le Pérou du XVIe siècle conquis par les Espagnols, et qui fait preuve d’originalité en ne reconduisant pas le stéréotype du « bon sauvage » et, enfin, sur les trois parodies dramatiques auxquelles Alzire a donné lieu l’année même de son triomphe ("Alzirette", "La Fille obéissante" et "Les Sauvages"). Des Sud-Américains imaginés par Voltaire, les parodistes retiennent leur occidentalisation, mais l’absence de vraisemblance ethnologique qui lui est reprochée, n’est pas exempt d’introduction de certains stéréotypes.