L’air peut-il permettre de penser le « prendre part » aux espaces publics urbains ? Comment oriente-t-il les pratiques urbaines ordinaires ? Ces questions guident une recherche exploratoire, à la croisée des travaux sur les transformations des milieux de vie et de ceux sur l’hospitalité des espaces urbains. Elles appellent une réflexion et une expérimentation sur les manières de représenter l’air et la respiration. Revenir aux modalités de l’expérience urbaine, c’est porter attention au corps dans l’espace public, à des corps qui différent dans leurs capacités et dans leurs sensibilités à être immergés dans un milieu (Thibaud, 2018 ; Ingold, 2012). Dans cette perspective, représenter l’air vise à dépasser son invisibilité et à traduire ses matérialités, non réductibles à la mesure quantitative (Engelmann, 2014). Il s’agit aussi de représenter l’expérience d’un air soumis aux aléas climatiques et aux dégradations écologiques, un air qui est aussi partagé, corespiré et coproduit (Coccia, 2016). Pour accéder à ces expériences, nous avons effectué des entretiens en marchant avec des asthmatiques et des allergiques, individus hypersensibles à la respiration révélant des savoirs pratiques et compétences sensorielles. Nous présentons ici une proposition de cartographie de ces itinéraires, qui répond à la fois à l’enjeu heuristique de compréhension des espaces publics en lien avec les changements environnementaux, à l’enjeu politique de contribuer au débat public en explorant de nouvelles manières de constituer l’air en problème public, et à l’enjeu opérationnel de contribuer à aux réflexions qui accompagnent la conception architecturale, urbaine et paysagère.