La décroissance en milieu rural n’est pas un phénomène nouveau. Depuis sa création, les politiques de l’Union européenne y répondent, de diverses manières et avec différents degrés d’efficacité. Cependant, nous assistons à un fort regain d’intérêt depuis cinq ans dans l’ensemble du cadre institutionnel, notamment au Parlement européen (Garcia Perez 2016, Margaras 2016, 2019), au Comité européen des régions (Gløersen et al. 2016, Herrera Campo 2017) et au Comité économique et social européen (Stenson 2017). Il se manifeste également par la création d’un intergroupe sur les zones rurales, montagneuses et isolées (RUMRA) et par la nomination du commissaire Dubravka Šuica, vice-présidente pour la démocratie et la démographie. Il est opportun de réévaluer la logique, la mise en œuvre et l’efficacité des approches politiques européennes, nationales, régionales et locales. Nous sommes à un moment critique : la décroissance en milieu rural est devenue un phénomène très visible qui alimente le mécontentement populaire. Simultanément, nous sommes de plus en plus conscients des nouvelles opportunités liées à l’évolution des contextes technologiques, commerciaux et sociaux. La crise de la COVID-19 accélérera le changement et stimulera la poursuite du débat. Le repeuplement des zones rurales ou au moins un meilleur ajustement au statu quo démographique sont probablement plus réalisables aujourd’hui qu’ils ne l’étaient il y a plusieurs décennies. La première étape, très simple, consistera à reconnaître la divergence croissante entre les zones rurales « en expansion » et « en déclin », ainsi que la nécessité d’apporter des réponses politiques adaptées. Si le dépeuplement est, bien sûr, un problème en soi, les processus socio-économiques et spatiaux sous-jacents montrent la nécessité de réévaluer plus largement les concepts de développement rural, de mettre davantage l’accent sur le bien-être et de s’éloigner des indicateurs purement économiques (OCDE, 2016, 2019, 2020). Dans un contexte de décroissance rural, les indicateurs économiques classiques (tels que le taux de chômage) ne rendent pas compte d’importants « ajustements d’équilibre » (notamment l’émigration sélective prolongée) qui ont des conséquences graves et qui questionnent le bien-être rural. La structure de ce rapport vise à « déployer » le matériel empirique et discursif généré par les activités de l’équipe du projet. La première partie définit la décroissance rurale, elle décrit les différents processus qui le provoquent et elle donne un aperçu de l’évolution des approches et des politiques de l’Union européenne. Ensuite, elle propose une analyse et une cartographie des données régionales disponibles pour illustrer la répartition spatiale de la décroissance (et de différents types) dans l’Europe rurale. On a adopté une approche plus qualitative/mixte pour réaliser l’étude comparative des huit études de cas, qui constituent un ensemble représentatif d’exemples territorialement cohérents du processus de déclin démographique dans les espaces ruraux, de ses effets locaux et régionaux complexes, et des interventions de l’Union européenne, aux échelles nationales, régionales et locales. Les parties suivantes du rapport présentent l’impact des décisions de gouvernance territoriale sur l’efficacité des politiques et sur certains aspects des politiques menées actuellement. Il faut mener une réflexion plus théorique sur les logiques d’intervention et les bonnes pratiques dans l’élaboration de politiques. La dernière partie du rapport présente des conclusions et des recommandations, ainsi que des suggestions pour mener des recherches plus approfondies.