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Communication Dans Un Congrès Année : 2022

Le fa'a'amura'a (confiage d’enfants en Polynésie), crise de la famille ou gestion des solidarités familiales ?

Résumé

En Polynésie française, le fa’a’mura’a désigne les pratiques de confiage temporaire ou permanent d’enfants : en tahitien, Fa’a’amu signifie littéralement « élever et nourrir ». Alors que l’anthropologie a largement documenté les pratiques de confiage et d’adoption dans les sociétés polynésiennes et plus largement dans le Pacifique sud dans les années 1970 (Panoff 1965; Ottino 1972), en l’absence de travaux plus récents, elles suscitent aujourd’hui de nombreux fantasmes. Parmi les idées reçues, le don d’enfant serait principalement motivé par des raisons économiques. Les femmes ne pouvant nourrir leurs enfants biologiques les donneraient à d’autres plus aisées, les enfants fa’a’mu (confiés) connaîtraient des difficultés d’insertion scolaire et seraient en proie à la délinquance, le don d’enfants serait le signe d’un aban-don. Le phénomène est ainsi surtout connu pour ses dévoiements : réponse à une situation de violence familiale, adoption internationale illégale, maltraitance et délinquance. Cette perception du fa’a’mura’a comme réponse à une crise est d’autant plus forte que la Polynésie connaît depuis 1996 une crise économique doublée d’une crise territoriale générant de fortes mobilités résidentielles (Sierra-Paycha et Lesage 2019), deux contextes susceptibles d’encourager des parents en situation de vulnérabilité à confier leurs enfants pour pallier les difficultés d’organisation quotidienne. Or, d’après les rares tentatives de quantification du phénomène (Sierra-Paycha, Lelièvre, et Trabut 2018), loin d’une pratique marginale et déviante, le fa'a'amura'a apparaît comme un phénomène très répandu. En mobilisant trois sources quantitatives (recensements quinquennaux de 1988 à 2017, enquête auprès des collégiens 2019 et enquête Feti’i e Fenua 2019-2020), nous quantifierons la fréquence de cette pratique, à la fois du point de vue des adultes et de celui des enfants. Cela permettra d’évaluer en quoi le fa’a’mura’a répond à une crise familiale, économique, territoriale ou bien s’inscrit dans un système de dons et contre-dons qui relève d’une pratique de solidarités intergénérationnelles, pratique comportant elle-même ses douleurs et contradictions (Lelièvre, Vivier, et Tichit 2008). Lelièvre, Éva, Géraldine Vivier, et Christine Tichit. 2008. « Parenté instituée et parenté choisie. Une vision rétrospective sur les figures parentales en France de 1930 à 1965 ». Population Vol. 63 (2): 237‑66. https://doi.org/10.3917/popu.802.0237. Ottino, Paul. 1972. Rangiroa, parenté étendue, résidence et terres dans un atoll polynésien. Cujas. Paris. Panoff, Michel. 1965. « La terminologie de la parenté en Polynésie. Essai d’analyse formelle ». L’Homme 5 (3‑4). Sierra-Paycha, Celio, Eva Lelièvre, et Loïc Trabut. 2018. « Le fa’a’amura’a. Confier et recevoir un enfant en Polynésie française ». Points forts ISPF/INED, no 1: 1‑12. Sierra-Paycha, Celio, et Alexandre Lesage. 2019. « Les mobilités résidentielles. Baisse de la mobilité résidentielle au sein de la Polynésie française, augmentation de l’immigration internationale et des retours ». Points forts ISPF/INED, no 4: 1‑10.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03718469 , version 1 (08-07-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03718469 , version 1

Citer

Eva Lelièvre, Celio Sierra-Paycha, Loïc Trabut. Le fa'a'amura'a (confiage d’enfants en Polynésie), crise de la famille ou gestion des solidarités familiales ?. XXIème colloque international de l'AIDELF : Démographie et crises, May 2022, Athènes, Grèce. ⟨hal-03718469⟩
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