Ce discours est-il bien un « grand discours »? Car à la première lecture il n’apparaît guère receler qu’une histoire du droit de la famille que tout étudiant de Master en droit privé doit connaître; un discours qui s’accorde en outre bien des libertés avec la rigueur du vocabulaire juridique. Pour percevoir la grandeur de ce discours « politique », il faut précisément l’appréhender comme tel, et sous l'éclairage des écrits de Christiane Taubira. Alors seulement le fil rouge de ce discours et son déroulement d’une grande cohérence apparaissent. Le fil rouge, ce sont la laïcité et les promesses républicaines, dans le sens où Christiane Taubira l’expose dans ses écrits. C’est bien au nom de la laïcité, condition d’une citoyenneté égale, que la ministre de la Justice affirme que le mariage et l’adoption ouverts aux couples de même sexe parachèvent une évolution vers l’égalité et répondent aux injonctions de la devise républicaine, en élevant le mariage au rang d’institution universelle. Mais s’agit-il d’un simple parachèvement d’une évolution vers l’égalité ou d’une révolution ? Car pour élever le mariage au rang d’institution universelle la réforme procède au détachement pluriséculaire du mariage de son enracinement organique.