Depuis une quinzaine d’années, l’agglomération antique de Senon-Amel (Meuse) et son environnement proche font l’objet de nouvelles recherches pluridisciplinaires associant des techniques d’investigation non destructives (prospections pédestres, aériennes, géophysiques, LiDAR) et des opérations de fouilles sédimentaires préventives et programmées. La documentation disponible sur l’agglomération et l’espace rural avoisinant rassemble aujourd’hui 33 opérations de fouilles, 220 ha d’imagerie géophysique (électrique, magnétique et géoradar), un relevé LiDAR couvrant une surface d’un peu plus de 13 000 ha, 1 645 clichés aériens et des prospections pédestres documentant 272 points de peuplement datables du second âge du Fer au haut Moyen Âge, répartis sur une superficie de 212 km². Ces données forment le socle méthodologique d’une thèse de doctorat récemment soutenue à l’université de Lorraine (Ritz 2020, vol. 1, p. 117-173). Cette enquête s’est principalement attachée à préciser l’origine et les modalités d’évolution de la forme urbaine de l’agglomération de Senon-Amel, qui se distingue par une configuration bipolaire très originale dans l’urbanisme de Gaule romaine. Cette communication propose une présentation des principaux apports de l’étude du cas de SenonAmel à la méthodologie des approches intégratives. Après avoir exposé le panel des sources disponibles et leurs caractéristiques techniques, on abordera les méthodes formelles mises en œuvre pour procéder à leur traitement. La difficulté consiste à parvenir à croiser efficacement les différentes sources disponibles sur les mêmes espaces : comment, en effet, articuler de manière systématique, dans l’analyse d’un même contexte archéologique, des visions aussi différentes que celles qu’offrent les méthodes de télédétection, extensives mais largement diachroniques, et les données chronostratigraphiques, précises mais ponctuelles ? C’est tout l’enjeu des approches intégratives, dont l’intérêt et la difficulté résident dans la masse et l’hétérogénéité des jeux de données qu’elles mobilisent. Cette démarche de confrontation des sources revêt une importance particulière à SenonAmel, où de nombreux espaces sont documentés par différentes méthodes d’investigation. On dispose en particulier d’une série de fouilles réalisées sur des parcelles qui avaient préalablement fait l’objet de prospections géophysiques. En dehors de ces aspects techniques, le formalisme méthodologique indispensable à la comparaison de sources hétérogènes fait apparaître des questionnements conceptuels importants. Il nous oblige en effet à analyser en détail la structure de la documentation et à repenser tout le processus de traitement dont elle fait l’objet, selon un objectif central : garantir le maintien d’une cohérence conceptuelle entre les sources, la problématique et les méthodes d’analyse. On évoquera pour finir les options retenues pour la présentation des données, car les méthodes de traitement mises en œuvre à Senon-Amel ont également servi de base à la constitution d’un atlas archéologique numérique, permettant de restituer la masse des données sous une forme homogène.