Dans le tournant du XIXe-XXe siècle, nombre de machines, appareils, inventions de toute nature visent à rendre compte du mouvement, ouvrir des perspectives, multiplier les points de vue, transformer le regard. Trains, photographie, rénovation urbaine, affichage, presse illustrée, toutes ces innovations concourent à représenter le monde, notamment en le rendant spectaculaire. Le cinématographe s’inscrit dans cette « révolution » dans ses dimensions esthétique, économique, historique : exemple des gares, sujets de peinture et qualifiées de « nouvelles cathédrales de l’industrie » ; ou du balcon des appartements parisiens voulus par Haussmann, comparé à une « loge généralisée ». On veut maîtriser aussi le temps : prises d’instantanés, ralenti dans un film, projection en arrière. Et, bien sûr, le temps ouvre sur la constitution de récits, tendance déjà présente dans la peinture et que le cinéma reprendra, en continuant à puiser dans l’Histoire où à mettre en film des faits divers. Indissociable de cet essor, l’individu vit à son tour une « expérience » en présence de toutes ces nouveautés et prend tour à tour le rôle de voyageur, spectateur, flâneur. Finalement médium lui-même – le trottoir roulant de l’Exposition universelle en 1900 à Paris fait des visiteurs des « caméras mobiles » –, il s’avère, d’hier à aujourd’hui, indispensable au développement du cinéma. A noter que le film est à voir en lien avec l’exposition « Enfin le cinéma ! Arts, images et spectacles en France, 1833-1907 », au musée d’Orsay, 2021-2022.