Globe constitué des restes des organismes vivants des premiers âges de la Terre chez Jules Michelet, cellules parfaitement hexagonales du nid de la guêpe ballonnière chez Jean-Henri Fabre, termitière infernale assimilée à une crypte matricielle chez Jacques Lacarrière, ruche accueillante pour des abeilles ayant tout d’abord essaimé autour du corps de Sue Hubbell, les insectes – ces in-secta au corps étymologiquement segmenté – coupent et transgressent toutes les catégories que nous élaborons à propos des vivants. Passé/présent/futur, sauvage/liminaire/domestique, collectif/singulier, instinct/raisonnement, autre/soi, fléau/bienfait, nos triades et nos dualismes s’entrechoquent. De fait, les insectes forent d’autres compositions au sein de nos cerveaux et de nos demeures. Ce qui pour nous semble destruction s’avère pour eux construction, survie et reproduction. La vrillette, l’abeille charpentière, le termite, le lucane minent nos charpentes, nos planchers et nos meubles pour y construire leurs alcôves et y loger leurs petits. Ces monstres à l’existence souvent collective sont aussi des merveilles. Aussi constituent-ils un défi pour les écrivains et écrivaines qui déstructurent la langue, décomposent le récit, allient invention et observation, passent de la vision binoculaire aux yeux à facettes pour approcher ces bestioles qui oscillent entre l’alien et le modèle.