Le dôme de Genbaku [bombe atomique], situé du côté nord du parc du mémorial de la paix à Hiroshima, est l'un des rares bâtiments à avoir résisté à l'explosion en août 1945. Le nom original du bâtiment est le Hall de la promotion industrielle. Conçu par l'architecte tchèque Jan Letzel (1880-1925), le bâtiment est construit en 1915 pour promouvoir le développement industriel dans la région. Après 1945, le Dôme devient instantanément l'un des symboles de la ville en ruines. Il fait l'objet d'innombrables publications touristiques (brochures, affiches, dépliants, guides, livres) et est présenté, aux côtés du sanctuaire de Miyajima, comme l'un des deux principaux lieux de pèlerinage de la ville. En 1966, la ville d'Hiroshima adopte une résolution selon laquelle le Dôme serait préservé "pour l'éternité" et se mobilise vigoureusement, à la suite de la signature par le Japon de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel en 1992, pour en faire un site du patrimoine mondial de l'humanité, qu'il devient en 1996. Cette présentation se propose de repenser la problématique générale de l'interprétation et de la réconciliation des mémoires à travers la présentation d’une analyse des débats sur la préservation du Dôme de Genbaku en trois temps : tout d’abord, l’étude des contextes locaux de l'immédiate après-guerre ; ensuite, l'émergence d'un mouvement pour la préservation du Dôme ; enfin, la demande d'inscription au patrimoine mondial de l'Unesco. Le caractère polémique des débats suggère une lente reconnaissance locale de la contribution des sites patrimoniaux liés aux conflits. La prise en compte du pluralisme interne et externe dans les programmes de préservation et de valorisation du patrimoine apparaît alors primordiale dans la perspective d’une histoire culturelle des traumatismes liés aux conflits du XXe siècle.