La zone étudiée sur le plateau de Beauce (France) est densément habitée durant l'âge du Fer et plusieurs fouilles archéologiques ont enrichi notre connaissance de leurs systèmes agraires. Cette étude se concentre sur trois fermes voisines qui ont livré de nombreux résidus de stockage des récoltes afin d'étudier la gestion de la fertilisation entre 400 et 80 avant notre ère. Nous avons échantillonné 18 lots de céréales de 50 grains carbonisés pour réaliser des analyses d'isotopes stables du carbone et de l'azote, couramment utilisés pour reconstituer les pratiques agricoles passées, et notamment le 15N comme proxy de l’utilisation de fumier dans les champs. Les trois espèces dominantes des sites ont été sélectionnées : blés nus, orge à six rangs et amidonnier. Les valeurs de δ15N varient entre 1,26‰ et 7,85‰, avec une augmentation au cours du temps de 3,31‰ à 5,57‰ (médiane par phase) reflétant une utilisation continue de la fumure durant plus de trois siècles. Les trois exploitations semblent avoir eu les mêmes stratégies de fumure : L'orge et l'amidonnier pourraient avoir été plus souvent fumés que les blés nus, contrairement à la région voisine d'Île-de-France (Aguilera et al., 2018). L'analyse de plusieurs lots de céréales provenant d'un même silo montre une variété de valeurs δ15N entre les cultures, reflétant des taux de fumure variés d’une année sur l’autre : certains champs ont été fertilisés alors que d'autres le sont moins. Les valeurs de Δ13C varient de 14,47‰ à 17,98‰. Ces valeurs sont difficiles à interpréter en termes de pratiques agricoles, comme cela peut être fait par ailleurs sous les climats méditerranéens. Dans les assemblages carpologiques des trois sites, l’amidonnier est plus souvent associé à des adventices d’été, tandis que structures spécialisées sur l’orge et les blés nus contiennent plus d’adventices des cultures d’hiver. L’amidonnier et les blés nus présentent des variations de valeurs de Δ13C, et en relation avec les adventices, nous proposons d’expliquer ces différences de discrimination du carbone par différentes dates de semis. L’orge a des valeurs de Δ13C 0,82‰ supérieures aux blés nus, comme il a été montré ailleurs en Europe, expliqué par le cycle de vie plus cours de l’orge.