Laval, antisémite qui s’ignore ou persécuteur cynique - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Revue d’histoire de la Shoah Année : 2020

Laval, antisémite qui s’ignore ou persécuteur cynique

Résumé

Le jeune Pierre Laval, socialiste révolutionnaire qui conteste à la République bourgeoise sa prétention à l’universalité, ne se voit pas en antisémite. Au contraire : moqué pour son physique, attaqué comme métèque, il retourne la rumeur qui en fait un juif, quitte à endosser une vision essentialiste. Il voit le Juif comme une sorte d’alter ego, victime, comme l’humble auvergnat, du mépris des élites. Cette convergence lui donne le sentiment de son incapacité à haïr et à nuire. L’arrivisme conduit pourtant le jeune élu à la Chambre (1914), maire d’Aubervilliers (1923) puis sénateur, à instrumentaliser les préjugés et les haines antisémites contre ses adversaires, dès la guerre et les années 20. La défaite de 1940 radicalise son discours comme son action. Le tombeur de la République justifie la réforme des institutions, le 10 juillet, par une xénophobie décomplexée. La politique de collaboration qu’il conçoit seul, devance les attentes nazis en matière de législation antisémite (statut du 3 octobre). De retour aux affaires, au printemps 1942, Laval apporte le concours de sa police à la déportation des juifs étrangers en zone occupée, avant de déporter ceux de la zone dite libre. S’il refuse de livrer ses concitoyens, pour démontrer la souveraineté de son gouvernement et tenir compte de l’impopularité d’une telle politique, il se s’oppose que tardivement aux projets de dénaturalisation massive des Juifs français. Il propose, enfin, de livrer les enfants juifs, sans ignorer leur sort. Après avoir été sans scrupule, son procès le montre sans remord./ The young Pierre Laval, a revolutionary socialist who challenged the bourgeois French Republic’s claim to universality, did not see himself as anti-Semitic—quite the contrary. Mocked for his looks and accused of being an immigrant, he decided to take advantage of his rumored Jewish heritage, even if it meant adhering to an essentialist vision. To him, being Jewish was a sort of alter ego that cast him as a victim of the elites’ contempt—no different from the humble Auvergnat. This identity made him incapable of hating or harming others.However, social climber that he was, the young man became a member of Parliament (1914), then mayor of Aubervilliers (1923) and a senator. He began weaponizing anti-Semitic prejudice and hatred for his opponents as early as WWI and the 1920s. The defeat in 1940 led him to radicalize both his viewpoints and actions. The “Toppler of the Republic” used unabashed xenophobia to justify institutional reform on July 10. The policy of collaboration he created on his own anticipated the Nazis’ expectations in terms of anti-Semitic legislation (Jewish Statutes, October 3). When he returned to government office in April 1942, Laval helped the police tasked with deporting foreign Jews to the occupied territory and deporting anyone in the socalled Free Zone. Although he refused to hand over his fellow citizens, signifying the sovereignty of his government, and taking into account the unpopularity of such a policy, he only belatedly opposed plans regarding the massive denaturalization of French Jews. He eventually offered to hand over Jewish children, knowing perfectly well what would happen to them. During his trial, the man who behaved so long without principles appeared remorseless.

Domaines

Histoire
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03221266 , version 1 (07-05-2021)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03221266 , version 1

Citer

Renaud Meltz. Laval, antisémite qui s’ignore ou persécuteur cynique. Revue d’histoire de la Shoah, 2020, 212, pp.121-151. ⟨hal-03221266⟩

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