Les analyses et les recherches sur le « local » sont souvent centrées sur la reconstruction des lieux de pouvoirs. L'analyse d'une douzaine d'expérimentations architecturales et urbaines sur l'environnement impulsées par le ministère de l’Équipement en province permet d'amorcer une autre approche et d'explorer le rôle d'autres types d'acteurs. En effet, dans un contexte de décentralisation juridique, de délocalisation économique ou encore de mobilisations citoyennes contre les décisions nationales et globales, les techniciens locaux (ingénieurs, architectes, urbanistes, environnementalistes, etc.) et autres acteurs intermédiaires participent à donner sens au local de différentes manières. Par leur lien fort avec leurs pairs des organismes centraux, ils jouent dans la reconstruction de rapports entre un État central et ce « local » inaccessible. Ces acteurs intermédiaires donnent corps au local pour nombre de responsables nationaux en confortant des points de dialogue sur le registre technique. Ces techniciens locaux et nationaux, en multipliant leurs réseaux, leurs appartenances, complexifient en même temps la mise en oeuvre locale des politiques publiques (notamment nationales). Ils renforcent le recours à des références, méthodes, outils en vogue dans des cercles nationaux et internationaux, tout en confortant les spécificités locales des problèmes que ces méthodes ou ces références sont supposées traiter.