Langage non-verbal, performance et classe sociale : des résultats contradictoires
Résumé
Les individus de classe populaire ? du fait de leur socialisation dans des contextes de vie marqués par l'incertitude et la connexion à autrui ? seraient
plus efficaces pour comprendre le langage non-verbal (LNV) d'autrui que les individus de classe favorisée (Kraus, Côté, & Keltner, 2010). Ce serait
particulièrement le cas lorsque le LNV d'autrui indique un contexte social hostile ou menaçant (Kraus, Horberg, Goetz, & Keltner, 2011). Les contextes
d'évaluation sont potentiellement menaçants pour les individus de classe populaire (Goudeau & Croizet, 2016) et la menace conduit à être plus vigilant
aux indices d'échec (Schmader, Johns, & Forbes, 2008). Un indice présent dans les situations d'évaluation est justement le LNV de l'évaluateur.rice.
Nous avons donc formulé l'hypothèse qu'en situation d'évaluation, les individus de classe populaire percevraient le LNV avec plus de précision que les
individus de classe favorisée, ce qui perturberait leur performance lorsque ce LNV peut être vu comme un signe d'échec (LNV froid). Une série de 4
études a montré des résultats mitigés et contradictoires. Deux études n'ont révélé aucun résultat significatif, notamment concernant l'effet de la
classe sociale sur l'identification des émotions (réplication étude 3 de Kraus et al., 2010, N = 293) ou des vrais et faux sourires sur des photos (N = 260).
62
Les participants de la deuxième étude réalisaient ensuite des matrices de Raven, chaque essai étant précédé d'un visage de personne faisant un
sourire soit vrai, soit faux. Les résultats n'ont révélé aucun effet significatif sur la performance. Deux études ont révélés des résultats contraires aux
hypothèses. La première (N = 523) indique que les individus de classe favorisée identifient mieux les faux sourires dans des vidéos d'évaluateur.rice
potentiel.le. Dans la dernière étude (N = 192) les étudiant.e.s avaient de moins bonne performance aux matrices de Raven lorsque l'expérimentatrice
avait un comportement non verbal (ton, contact visuel, sourire) froid plutôt que chaleureux mais cette différence était plus forte chez les étudiant.e.s
de classe favorisée plutôt que populaire. Les résultats seront discutés au regard des petites tailles d'effet, des variations de procédure (plus ou moins
proche d'une interaction réelle) et des implications théoriques.