La liminalité des élèves classés déficients intellectuels : une situation dramatique ?
Résumé
La CLIS 1 peut être considérée comme le lieu de la liminalité : les élèves sont accueillis au sein de l’école tout en étant écartées du reste de la population scolaire. Ils doivent cependant connaître des temps de scolarisation en classe ordinaire. La mise en place d’un dispositif de socio-clinique institutionnelle (Monceau 2012, de Saint Martín, 2014) sous la forme de séances de réflexion collective a permis élèves de trois CLIS 1 de la région parisienne de mettre au jour leurs rapports à l’institution scolaire.
Le concept de liminalité, mis au jour par Turner (1969) à partir des travaux de Van Gennep (2001) a été repris par Murphy (1990) pour définir la situation des personnes handicapées moteur. Des chercheurs français l’utilisent pour caractériser toute forme de handicap. La liminalité définit une situation irréversible et dramatique. Les individus handicapés sont définitivement maintenus dans les interstices de la société, parce que leur écart à la forme ordinaire représente une menace pour l’ordre social, du fait d’une impossibilité d’expérience commune, du déni par la société de leur « être de culture » (Murphy, 1990 : 75).
la CLIS peut être pensée comme un espace liminal. Les résultats de ma recherche enrichissent le concept de Murphy, par la mise au jour de l’empan liminal, qui désigne la variété de situations liminales s’exprimant dans différentes dimensions, institutionnelle, structurelle, culturelle, sociale, individuelle. L’empan liminal montre que la situation de ces élèves n’est ni dramatique, ni figée mais s’inscrit dans un processus dynamique bénéfique à leurs yeux, malgré ses contradictions et les difficultés, notamment en termes de socialisation, que ces élèves doivent surmonter. La liminalité de la CLIS leur permet de se construire identairement « comme les autres ».