Curricula et citoyenneté en Suède : de l’État éthique à l’ère de la déréglementation - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue International Journal for history and social sciences education / Revue internationale de didactique de l’histoire et des sciences sociales. Année : 2018

Curricula et citoyenneté en Suède : de l’État éthique à l’ère de la déréglementation

Résumé

The reforms that compulsory schooling have undergone in Sweden since the Second World War have been inspired by the radical ambition of changing schools into a machine for “educating democratic individu- als”. A “school for citizenship” would gradually wipe out an outdated, hierarchical educational model. This article explores how this ideal has permeated the discourse on curriculum reform up until now, often clash- ing with the epistemological profile of the humanities. The legal and technical toolkit for developing curriculum is the empirical basis for verification. The move towards a technological approach to the development of curriculum appears as a driving factor. Since the 1950s, state-controlled psychological and pedagogical experts have explored new techniques for adjusting core academic subjects to meet the most press- ing needs of a modern society. These practices (consultations with busi- ness stakeholders, tests to judge the impact of teaching on the interests of pupils, etc.) prompted a smooth translation of civic objectives into teach- ing recommendations. Two consequences of the new pattern of curriculum development, from the 1950s to the 1980s, are examined: the proliferation of “socially rel- evant” study objects and the formalisation, through all school subjects, of the teaching of Swedish “common values”. In this respect, the legiti- mising role played by central procedures for authorisation, introduced since 1974 to guarantee both “objectivity” and the conformity of teaching with ethical principles, is also assessed. Since 1990, despite the ongoing decentralisation of authority for education and curriculum deregulation, school authorities seem to be intensifying their references to “fundamen- tal values”, which are often the subject of awareness-raising campaigns. Nonetheless, the state authorities’ commitment to cultural diversity and pupils’ self-determination is limiting the normative scope of education on these matters, redirecting it instead towards training in mutual respect and soft social skills.
Une ambition radicale – transformer l’école en un appareil apte à « édu- quer des démocrates » – sous-tend le programme de réformes qui vise l’en- seignement scolaire obligatoire en Suède, à partir de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Remplacer un modèle éducatif dépassé et hiérarchique par une « école de la citoyenneté » est l’idéal affiché par les initiateurs des réformes. L’article examine la manière dont ce dessein pénètre dans le discours sur la réforme des curricula, jusqu’à nos jours, en se focalisant notamment sur les tensions qu’il a engendrées avec le profil épistémolo- gique des humanités. L’analyse empirique est fondée principalement sur l’évolution de l’arse- nal juridique et l’action des comités d’experts qui interviennent dans la modernisation des programmes. L’élément déclencheur est l’évolution vers une approche technologique du curriculum : dès les années 1950, l’expertise psychopédagogique mobilisée par l’administration élabore de nouveaux outils dans l’espoir d’ajuster les disciplines académiques cen- trales aux besoins les plus impérieux de la société moderne. De nouvelles procédures – allant de la consultation des parties prenantes au test de la correspondance des sujets aux intérêts des élèves – favorisent la transpo- sition des nouveaux objectifs d’éducation civique en recommandations pédagogiques. L’article examine deux des effets de ce nouveau modèle sur le cursus des études, entre 1950 et 1980 : d’une part, la prolifération de sujets « socia- lement pertinents » et d’autre part la formalisation de l’enseignement de valeurs suédoises « communes », de manière transversale aux disciplines. Le texte analyse notamment le rôle de légitimation des procédures cen- trales de certification des manuels scolaires, introduites en 1974 pour assurer à la fois l’« objectivité » des supports de l’enseignement et leur alignement avec les engagements éthiques du système. A partir de 1990, en dépit de la décentralisation croissante des responsabilités en matière d’éducation et de la dérégulation des curricula, le discours des autorités scolaires intensifie la référence aux « valeurs fondamentales », jusqu’à en faire l’objet de campagnes de sensibilisation ad hoc. Cependant, l’attachement du pouvoir étatique à la diversité culturelle et à l’auto- 63 détermination des élèves pose de fortes limites au caractère normatif de l’enseignement sur ces sujets, qui finit par se rabattre sur une éducation au respect et aux compétences fondamentales.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03089248 , version 1 (28-12-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03089248 , version 1

Citer

Piero Simeone Colla. Curricula et citoyenneté en Suède : de l’État éthique à l’ère de la déréglementation. International Journal for history and social sciences education / Revue internationale de didactique de l’histoire et des sciences sociales., 2018, 3, pp.63-84. ⟨hal-03089248⟩
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