I.M.A.P.I, a pour objectif de développer une étude interdisciplinaire innovante consistant en la réinterprétation d’un corpus musical polyphonique du XIVe siècle dans un contexte acoustique virtuel historiquement informé. Ce projet pose la question de la recréation des conditions d’écoutes du Moyen-Âge et de la recréation du geste musical qui découle d’une modélisation en 3D. Il s’agit ici d’interroger l’écoute musicienne patrimoniale du XIVe siècle à travers un corpus d’œuvres polyphoniques avignonnaises et de l’interpréter dans un environnement acoustique virtuel immersif1. Il s’appuie sur un lieu patrimonial majeur pour la musique : la chapelle pontificale du palais des papes d’Avignon et implique une collaboration unique avec l’ensemble Diabolus In Musica (Dir. A Guerber). IMAPI résulte de la coopération entre l'UMR PRISM (AMU-CNRS), l'UMR LAM (Institut d'Alembert Paris VI) et Avignon Tourisme (Palais des papes), la société Histovery / Histopad. La réalisation de différents modèles sonores 3D nous conduira à interroger la perception sensorielle des musiciens qui interprètent la musique médiévale patrimoniale dans une acoustique virtuelle reconstruite. Grâce à une étude musicologique, IMAPI visera à comprendre l'impact que pourrait avoir un environnement numérique sur le geste vocal produit par un ensemble de musique médiévale spécialisé dans ce répertoire. L'étude portera précisément sur : (1) Un extrait de messe polyphonique au temps de Clément VI. Le motet politique dédicacé à Clément VI, Petre Clemens / Lugentium siccentur / Non est inventus. (2) Un corpus d'œuvres musicales politiques telles que les motets issus des manuscrits d'Ivréa ms 115 et 16bis du trésor d'Apt. Le choix de ces œuvres polyphoniques concerne des productions qui, à l'époque de leur création, étaient destinées à une diffusion dans un espace où l'acoustique permettait la compréhension des textes. Dans la mesure où, désormais, l'occupation de l'espace dans l'édifice n'est plus le même, il sera donc nécessaire d'intégrer dans l'élaboration du dispositif virtuel les différences concernant le mobilier, les tentures sur les murs et les tapis au sol. Les reconstitutions menées en 2017 par la conservation du Palais des papes pour les tablettes histopad en réalité augmentée, ont permis d'établir des éléments précieux sur l'état de la chapelle clémentine à l'époque médiévale : le mobilier influençait très certainement l'acoustique qui devait être beaucoup moins réverbérante qu'aujourd'hui. La prise en compte de ces différences et de leur intégration dans le dispositif permettra de poser des hypothèses sur la façon dont ces pièces sonnaient et étaient interprétées à l'époque au sein des différents points d'écoute présents dans le lieu. Du point de vue de l'interprétation des corpus médiévaux, Le regard musicologique se veut donc complémentaire aux études historiques et archéologiques effectuées sur le palais. Il permettrait, de surcroît, un regard singulier sur l'activité musicale polyphonique liturgique dans la cour papale. Ce projet s’inscrit ainsi plus largement dans un questionnement autour de la médiation du patrimoine matériel et immatériel. Comment la musique interprétée dans un environnement acoustique virtuel peut-être elle apporter sa contribution à une meilleure compréhension par les publics visiteurs du patrimoine bâti, invitant à la découverte de monuments sonnants et résonnants ? La musique jouée dans son contexte d’origine peut-être elle permettre au public d’aborder l’histoire sous une nouvelle perspective ? A l’inverse, comment la création d’un environnement acoustique virtuel immersif invite-t-elle le public à redécouvrir la musique autrement, inscrite dans un écosystème sensible ? Cela conduira à induire de nouveaux modes de diffusion qui pourraient déboucher sur de futurs concerts de musique médiévale insérés dans une acoustique patrimoniale en immersion 3D et à de nouvelles visites musicales du patrimoine bâti. Nous souhaitons ainsi aborder le projet IMAPI de manière pluridisciplinaire, mettant la musique au cœur de notre recherche et mêlant l’approche de musicologues d’une part, d’interprètes de l’autre et enfin, de chercheurs en sciences de l’information et de la communication intéressés dans ce projet par la vulgarisation scientifique, la valorisation du patrimoine et la médiation de la musique.