La question soulevée était de savoir si était compatible avec le principe de libre prestation des services une loi d’un État membre de l’Union interdisant sur le territoire national la retransmission télévisée de manifestations sportives qui se déroulent dans d’autres États membres, lorsque ces retransmissions montrent des panneaux publicitaires vantant des produits dont le premier État interdit la promotion à la télévision. Le problème en l’espèce concernait la promotion de boissons alcooliques et portait sur la légitimité de la loi française, dite loi Évin, au regard du droit communautaire. La question de la compatibilité de cette législation avec le traité CE était soulevée depuis longtemps et n’était toujours pas résolue. On se souvient que les dispositions françaises avaient conduit Antenne 2 à ne pas diffuser, en 1995 déjà, la rencontre de rugby du Tournoi des cinq nations Irlande contre France. Pourtant, l’internationalisation croissante de la publicité, l’engouement pour les manifestations sportives et leur part croissante dans les programmes télévisuels imposaient de trouver une solution. La Cour a estimé que la question posée était irrecevable en la forme. Toutefois, cet article suggère des éléments de réponse. Sur le fond, ils peuvent certes apparaître comme provocateurs. Toutefois, d’un point de vue juridique, le but est d’articuler principes communautaires et dispositions nationales et de rappeler que les règles internes, restrictives de la liberté de prestation des services, doivent respecter les critères de nécessité et de proportionnalité posés par la juridiction de Luxembourg. De plus, si les traités communautaires admettent l’existence de règles nationales plus strictes, ces dernières ne peuvent a priori s’appliquer qu’à l’égard des seuls diffuseurs nationaux (principe de la discrimination à rebours). Le 13 juillet 2004, dans le cadre d’une affaire qui opposait la même société Bacardi-Martini à TF1, une solution différente a été rendue par la juridiction communautaire qui a jugé la loi Évin compatible avec le droit communautaire (affaire C-249/02). La CJCE a retenu la légitimité de la restriction à la libre prestation des services, en affirmant purement et simplement l’influence sur la santé de la publicité pour les boissons alcooliques, sans renvoyer à des critères scientifiques et en inversant indubitablement la charge de la preuve. Se pose alors la question de savoir si l’on peut accepter que de telles mesures de protection de la santé publique dépendent des autorités nationales et soient aussi diverses qu’inégales.