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Communication Dans Un Congrès Année : 2019

L’appropriation territoriale des nouvelles gares TGV périphériques françaises au miroir des SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale)

Résumé

Face à la grande diversité des dynamiques territoriales liées à la grande vitesse ferroviaire et aux difficultés rencontrées pour isoler l’influence de la nouvelle offre de transport des autres facteurs intervenant dans les évolutions socio-économiques et spatiales des territoires, les chercheurs s’attachent désormais davantage à la compréhension des processus par lesquels naissent les changements territoriaux en questionnant la façon dont les acteurs territoriaux s’approprient à travers leurs comportements, leurs pratiques et leurs représentations, la nouvelle offre de transport. Comme l’ont montré de nombreux travaux, l’infrastructure et les nouvelles conditions d’accessibilité qui lui sont liées ne constituent en définitive qu’une opportunité de développement dont les acteurs doivent se saisir par le biais de mesures d’accompagnements et de stratégies de valorisation adéquates. Condition de réussite des projets de territoire initiés lors de la mise en service d’une nouvelle infrastructure de transport, l’appropriation apparaît comme un processus essentiel, dont il convient de décrypter les mécanismes pour faciliter la compréhension des recompositions territoriales liées à l’arrivée de la grande vitesse. Il ne s’agit plus de poser la question des « effets » de l’infrastructure sur l’organisation de l’espace, mais de saisir les processus par lesquels naissent les changements territoriaux afin d’analyser plus finement les interactions qui s’établissent entre réseau et territoire. Ce changement de focale revêt un triple intérêt. Il permet, en premier lieu, d’affiner la compréhension des jeux d’acteurs participant à la territorialisation de la grande vitesse, en considérant l’appropriation comme un processus co-construit, né des interrelations entre les pratiques de mobilité et la façon dont la nouvelle offre de transport a modifié le quotidien des individus, le fonctionnement des entreprises et les stratégies de développement territorial. Ces pratiques ne pouvant être dissociées des représentations collectives et individuelles dont elles découlent et qu’elles modifient en permanence, aborder l’analyse sous l’angle de l’appropriation permet ainsi d’appréhender « l’effet image », difficilement quantifiable, de la grande vitesse ferroviaire. Inscrite dans la durée, l’appropriation permet enfin de réinterroger la dimension temporelle du processus. L’appropriation est en effet un processus long et évolutif qui débute dès les premières réflexions qui accompagnent l’émergence du projet, et se poursuit une fois ses usages banalisés. Afin de répondre à ce triple enjeu nous proposons un cadre méthodologique destiné à rendre compte de la façon dont l’appropriation se construit au cours des différentes étapes de mise en oeuvre d’un projet de LGV. Inspirée des travaux d’O. Brunel et D. Roux sur les actes appropriatifs des consommateurs, la grille d’analyse vise à reconstituer les trajectoires d’appropriation de la nouvelle offre de transport en croisant l’analyse des stratégies et des représentations qui leur sont liées. En effet, si les différents travaux consacrés à l’appropriation mettent l’accent sur l’action des acteurs sociaux, ces actes ne peuvent être dissociés des représentations qui les ont fait naître. « Pratiques et représentations sont toujours indissociablement liées » (Gumuchian, 1991), constituant deux facettes d’un processus complexe « où se mêlent des représentations collectives, des perceptions individuelles et des mécanismes de réponse et d’adaptation » (Taddei et Staii, 2008). Les représentations induites par le renouvellement de l’accessibilité ferroviaire constituent un élément indispensable à la compréhension des pratiques et stratégies qui sont à l’origine des transformations spatiales consécutives à la mise en service d’une nouvelle LGV. Si les réorientations des politiques de valorisation de la grande vitesse et l’identification des facteurs qui en sont à l’origine nous éclairent sur l’évolution des logiques d’appropriation, le suivi de ces stratégies sera plus spécifiquement mis en perspective avec la façon dont le renouvellement de l’accessibilité ferroviaire et les projets d’aménagement qu’il a suscités sont intégrés dans les projets de territoire. Ces derniers seront abordés par le biais d’une analyse comparée des Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) dont le caractère global et transversal, fondé sur un modèle territorial visant à renforcer l’articulation entre aménagement et déplacements, permet d’appréhender de façon objective la place dévolue à la grande vitesse dans le projet de territoire. La place accordée aux gares TGV et au renouvellement d’accessibilité dans le diagnostic territorial et l’articulation des stratégies de valorisation de la grande vitesse avec le projet global de développement territorial (PADD) sont en effet révélateurs de la façon dont les acteurs politiques et institutionnels se sont approprié la nouvelle offre de transport. Ces documents de planification territoriale, très normés dans leur forme comme dans leur contenu, se prêtent également bien à une analyse sémantique de l’imaginaire des gares, à partir de leur « mise en mots » et de leur « mise en image », au sens propre du terme. Les rapports de présentation des SCOT ont ainsi fait l’objet d’une analyse sémiologique et lexicale mobilisant les outils et méthodes de l’analyse de contenu (Bardin, 2013 ; Lebart et Salem, 1994, Maingueneau, 1984) (cf. Doc 1) afin de rendre compte des représentations attachées à la nouvelle offre de transport. La démarche, appliquée aux SCOT du pays Barrois (desservi par la gare TGV Meuse), du très Grand Besançon (desservi par la gare Besançon Franche-Comté TGV) et du Grand Rovaltain (desservi par la gare Valence TGV), tous trois desservis par de nouvelles gares TGV implantées en périphérie urbaine, montre qu’en dépit d’une insertion spatiale assez semblable des gares et de stratégies de valorisation identiques, les trois documents de planification territoriale font état de modalités d’appropriation bien distinctes de la grande vitesse par les acteurs politiques locaux. Si, sans surprise, les SCOT réaffirment le sempiternel lieu commun entre accessibilité ferroviaire et attractivité du territoire, les valeurs que les acteurs politiques locaux attachent à la grande vitesse se déclinent de façon différente. L’identification des valeurs que les acteurs institutionnels attachent aux gares et à la grande vitesse, la compréhension de la façon dont ses valeurs sont construites et parfois instrumentalisées, sont indispensables à l’analyse des pratiques et stratégies spatiales mises en oeuvre. En nous éclairant sur ces pratiques, la prise en compte de la dimension symbolique et imaginaire des gares facilite la compréhension des formes d’appropriation de la grande vitesse et la variété des dynamiques observées. Parce qu’elle « se construit dans la relation avec l’objet » (Jouet, 2000), l’appropriation participe à la structuration du territoire et à l’émergence de nouvelles dynamiques territoriales. Largement contingentes, ces dernières résultent d’un processus au cours duquel les acteurs territoriaux, dans un contexte spatial et temporel donné, interprètent les changements introduits par la nouvelle offre de transport, les adaptent à leurs attentes et les intègrent à leurs pratiques, modifiant par ces actions les caractéristiques de l’offre et les valeurs qu’elle véhicule. Au fil des interactions, ce double mécanisme d’adaptation se répercute sur le système territorial global qui en retour fait évoluer les fonctionnalités de la nouvelle offre et les pratiques et représentations des acteurs territoriaux, expliquant ainsi la grande variété des dynamiques territoriales suscitées par des projets pourtant conçus selon la même logique.

Domaines

Géographie
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02389455 , version 1 (02-12-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02389455 , version 1

Citer

Valérie Facchinetti-Mannone. L’appropriation territoriale des nouvelles gares TGV périphériques françaises au miroir des SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale). Rencontres Francophones Transport Mobilité 2019, Jun 2019, Montréal, Canada. ⟨hal-02389455⟩
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