en france comme aux états-unis, les juges sont confrontés à la circulation des droits. L’expression, pour faire simple, désigne la faculté que possède le droit d’un état, d’une organisation internationale ou non gouvernementale, de s’implanter dans un autre ordre juridique. La circulation inclut en sens inverse la capacité d’un ordre juridique à intégrer du droit dont il n’est pas le créateur. exporter du droit ou l’importer, le phénomène n’est pas nouveau. depuis longtemps, les droits des états s’influencent réciproquement, s’interpénètrent même, souvent. Tout simplement parce que les systèmes juridiques ne fonctionnent pas en vase clos. La nouveauté vient de l’ampleur de cette circulation et de son caractère plus systématique. Rares sont les pays dans lesquels la justice ou les juges, à un moment ou un autre, ne tiennent pas compte d’un droit extérieur, soit pour la solution à donner à un litige, soit pour l’organisation de la justice. il peut s’agir, pour les états-unis, du droit d’une organisation non gouvernementale, de celui d’une cour internationale ou de la jurisprudence d’un tribunal étatique. Rien n’interdit aux états-unis de s’inspirer de ces sources de droit. La situation de la france est différente. comme les états-unis, elle accorde une place essentielleà ces sources de droit. Mais surtout, elle est sous l’influence du droit de l’union européenne. Peut-être serait-il d’ailleurs plus exact de parler de domination du droit de l’union européenne puisque celuici s’impose au juge national. Par-delà leurs différences, les deux pays n’en partagent pas moins des ressemblances. Sur certains aspects, la situation est même beaucoup plus proche qu’elle n’y paraît. dans les deux cas, l’importation d’un droit extérieur a suscité des réactions de rejet, entraînant même des résistances. L’étendard de cette résistance était assez similaire en france et aux états-unis : risque de banalisation de la constitution, voire même de sa transformation en une norme négligeable car dépassée par le droit étranger, pouvoir hégémonique des juges, atteinte à la séparation des pouvoirs, disparition des systèmes juridiques nationaux. Toutes ces évolutions partagent un trait de caractère en commun: la remise en cause d’une certaine forme de démocratie. Assez naturellement, une telle remise en cause n’a pas été sans susciter de résistances. La résistance a tenté de s’opposer en france à la primauté du droit européen et aux états-unis, à l’importation du droit étranger par la cour suprême.