Les arts décoratifs et industriels deviennent, dans la seconde moitié du XIXe siècle, le champ d’élaboration d’idéaux sociaux progressistes liés à ces mêmes utopies révolutionnaires qui ont mené d’abord aux révoltes ouvrières de 1848, guident ensuite certains courants réformateurs pendant l’Empire et empreignent enfin la frange républicaine radicale à partir des années 1870. Imaginer les formes d’une beauté qui intègre pleinement les notions d’utilité et de diffusion élargie implique la valorisation des arts du décor et la prise en compte des modes de production industrielle. L’action de l’Union centrale des Arts décoratifs s’avère alors décisive, et ce malgré l’évolution de cette société : surgie des rangs des ouvriers d’art, elle est l’émanation, dans les années 1880, d’une nébuleuse conservatrice et néanmoins ouverte aux avancées techniques. La question du « style » des objets produits par l’industrie est cruciale, car c’est sur la capacité à inventer une nouvelle « beauté rationnelle » que repose la possibilité, pour l’individu subissant un travail d’où toute créativité a disparu, de recréer une communauté. Les esthétiques sociologiques du tournant du siècle contribuent grandement à la réflexion sur ces modalités de partage de la beauté ; c’est précisément cette beauté que l’Art nouveau tentera d’introduire dans l’environnement quotidien, confiant dans la conciliation d’art et technique.