Par le principe de Yuti possidetis, l'Etat nouveau s'engage à conserver comme frontières les limites qui étaient celles du territoire dont il est issu. Ce principe connaît désormais une consécration puisqu'après avoir été appliqué aux décolonisations sur les différents continents (Amérique latine, Afrique et dans une moindre mesure en Asie), il est devenu le principe cardinal des mutations territoriales que connaît l'Europe depuis quelques années. Loin des frontières brumeuses et impalpables de D. Buzzati (Le désert des Tartares) ou de J. Gracq (Le rivage des Syrtes), Yuti possidetis garantit une ligne tangible reconnue juridiquement. Uuti possidetis apparaît juridiquement comme l'aboutissement de toute une construction qui fait des traités de frontières en particulier et de la frontière en général un élément immuable du droit des relations internationales. La continuité des traités de frontières est sans doute une des mieux protégée qui soit. Cette construction plonge ses racines dans l'histoire. Déjà le traité de paix de 1783 entre les Etats-Unis et l'Angleterre fait de la succession aux droits et obligations de nature territoriale une exception au principe de la table rase. Ces préludes vont être confirmés au XXe siècle avec des codifications qui vont renforcer le caractère objectif des traités territoriaux et de frontières. Selon la synthèse de Tran Van Minh : « On considère que les traités territoriaux sont d'une nature particulière ; ils créent ou transfèrent, ou reconnaissent l'existence de certains droits permanents, qui acquièrent ou maintiennent une existence séparée et une validité indépendante des traités qui les ont crées ». Tout concourt à cet objectif. Le droit des traités et la jurisprudence vont se renforcer mutuellement jusqu'à créer dans l'esprit des Etats une opinio juris qui donne au respect des frontières héritées de l'Etat prédécesseur un caractère coutumier.