Les interactions entre soignants et soignés sans-abri comme révélateurs de malentendus
Résumé
La vie à la rue amène progressivement les individus sans-domicile vers des rapports au corps, au temps et à la maladie différents de ceux qu'ils avaient avant d'être confrontés à ces conditions de vie extrêmes. De leur côté, les soignants développent également des conceptions particulières du soin, de la santé, du corps et du temps. De plus, le cadre institutionnel réglementé de l'hôpital n'est pas supporté de la même manière par ces deux groupes : alors que les soignants ont l'habitude d'y évoluer, les personnes de la rue peuvent rencontrer d'importantes difficultés à respecter des règles et une hiérarchie qu'ils ne comprennent pas.
Ainsi, lorsque ces deux groupes se retrouvent en situation d'interaction, de nombreux obstacles se dressent face à leur compréhension réciproque. Ces malentendus rendent difficiles la communication, la coopération, voire l'établissement d'une relation entre les deux groupes et peuvent avoir pour conséquence le renoncement aux soins des individus sans-domicile ou leur rejet du soin par les soignants, ce qui correspond à des stratégies d'évitement des situations pouvant amener au conflit. Mais avant d'en arriver à ces situations extrêmes, les malentendus entre soignants et soignés en grande précarité semblent être négociés et maintenus afin d'éviter au maximum les conflits ouverts.