Cuisines du Monde au bout du Monde : le cas de Leh (Ladakh, Inde) - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2012

Cuisines du Monde au bout du Monde : le cas de Leh (Ladakh, Inde)

David Goeury

Résumé

Leh, capitale historique du royaume du Ladakh, était une riche ville marchande au croisement des routes transhimalayennes entre Baltistan, Cachemire, Tibet et Yarkand, avant qu’elle ne devienne un bout du Monde entre l’Inde, la Chine et le Pakistan, suite au conflit indo-pakistanais en 1947 et à la guerre sino-indienne de 1962. Front militaire, le gouvernement indien a décidé de rouvrir progressivement la région aux étrangers à partir de 1974. Entourée par les cols routiers les plus élevés au Monde, carrossables seulement quelques mois par an, la région a été érigée en une destination privilégiée du tourisme d’aventure. Dans un premier temps, elle a attiré essentiellement de jeunes Occidentaux en quête de royaumes tibétains oubliés. Puis, suite à la construction d’un aéroport, Leh s’est progressivement transformée en une station touristique estivale où fleurissent les guest-houses et les restaurants. En 2008, elle accueille plus de 74 334 visiteurs dont 35 311 étrangers. Malgré les difficultés d’approvisionnement liées au surcoût de transport, cette ville dispose d’une offre culinaire pléthorique nourrie de références mondiales. Alors que traditionnellement se superposaient divers héritages culinaires transmis par continuité spatiale que cela soit depuis le Cachemire ou depuis le Tibet à des pratiques culinaires locales, de nombreux restaurants se revendiquent comme multicuisine et mettent en avant leur capacité à proposer des plats venus des différentes parties du Monde. "We serve breakfast, lunch, dinner, Indian, Chinese, Italian, Israeli, Mexican, continental" peut-on lire devant le restaurant Seldon Garden. Tandis que l’ardoise du Zen Garden propose pêle-mêle : " sexy Thai soup’s, lazy Italian pasta’s, never ending momo’s, punky Mexican dish, boring Indian dish, Israeli special, homemade tofu, wood oven pizza’s…". Il apparaît alors une disjonction entre une revendication de nombreux touristes d’ingérer le pays pour effectuer le vrai voyage et la réalité de la consommation. Ce foisonnement gastronomique est associé à des espaces de restauration qui mettent en avant leur dimension de jardin ou de la terrasse. De fait, Leh et ses restaurants constituent une halte reposante après un voyage éprouvant. Les professionnels se doivent alors de répondre à la superposition de demandes culinaires entre désir de découverte et nécessité de régénération physique et morale par la nourriture. Au-delà de l’apport calorique nécessaire à la survie de l’individu, ces lieux permettent d’observer comment « Manger» est à la congruence d’un conscient de distinction et d’un inconscient de mémoire. Seulement la réponse effective à une demande internationale n’est pas sans poser des problèmes d’organisation des établissements de restauration multicuisine. Ces derniers s’inscrivent dans une circulation de la main d’œuvre à l’échelle nationale. Enfin, il est possible de s’interroger sur l’image du Monde globalisé renvoyée depuis ces restaurants et surtout leur acceptation relative par les populations locales

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Identifiants

  • HAL Id : hal-01656668 , version 1

Citer

David Goeury. Cuisines du Monde au bout du Monde : le cas de Leh (Ladakh, Inde). Géographie et cultures. Les établissements de restauration dans le Monde, L'Harmattan, 2012, 978-2-336-00420-4. ⟨hal-01656668⟩
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