Artus de Bretagne est un roman en prose composé au début du XIVe siècle dans l'entourage du duc de Bretagne. L'action se situe en marge de l'univers arthurien: l'action se déroule après la mort du grand roi Arthur et des liens ténus existent avec le glorieux passé breton: le maître qui accompagne le héros s'appelle Governau et nous rappelle le maître de Tristan; le chevalier Arthur est de la famille du vaillant Lancelot du Lac, et surtout de nombreux épisodes empruntent à la matière arthurienne. Ce roman, relativement court, n'est pas encore édité, mais a été étudié par Sarah Spilbury dans sa thèse, malheureusement dactylographiée, mais heureusement reprise en partie dans des articles. C'est un texte très intéressant pour ce qui est de l'étude du genre romanesque: d'une part il témoigne de ce que devient la matière arthurienne au XIVe siècle, après les grands cycles en prose centrés sur le Graal, et d'autre part il a connu une survie remarquable, du XIVe siècle au XIXe siècle, qui permet de travailler sur la longue durée. Cette survie a été abordée, mais très superficiellemnt par la thèse d'une étudiante coréenne Tcho Hye Young, elle a intéressé F. Suard, dans une table ronde récente à Troyes sur les récritures, elle m'a aussi déjà retenue pour ce qui est des versions du XVe. Je me propose aujourd'hui de voir comment le merveilleux, qui entretient des rapports très étroits avec le roman arthurien, évolue d'une version à l'autre. Le point de départ est constitué parles manuscrits du XIV donnant le texte premier, qui se termine de façon abrupte sur un enchantement du clerc Estienne: je travaillerai à partir du manuscrit BnF. fr. 761, le plus ancien 1. Du XVe siècle et du XVIe , on a conservé ce que Sarah Spilbury appelle "la version commune" proposant une fin à ce texte à la clôture un peu brutale: Artus et Florence ont un fils et Artus hérite du trône (Arsenal 2992 du XVe siècle, BnF. 1431 petit volume du XVIe, New York Public LIbrary 114 donne une fin quelque peu différente, mais guère plus développée). A côté de cette version commune, le XVe conserve trois 1 Il existe un autre manuscrit du XIVe siècle, celui de Carpentras 403. On peut supposer aussi avec B. Woledge que l'existence d'un manuscrit perdu, relevé dans l'inventaire de 1373 de la bibliothèque de Charles V.